Expertise fonction publique pour maladie professionnelle - Assez choquée

[Ella75]

Coucou à toutes et tous,

Tout d'abord un petit mot pour dire comme je suis effarée par les nombreux témoignages récents de mépris de la souffrance au travail (privé ou FP), que ce soit au travail même ou dans les services qui s'en occupent, ou pire encore chez les médecins.

Je suis dans la FP, en CLM et demande de reconnaissance de maladie à caractère professionnel.

Il y a quelques temps le médecin de mon administration m'a reçue pour statuer sur le caractère professionnel de ma pathologie. Notez que ce médecin est une généraliste. L'entretien s'était à mon sens bien passé, je l'ai trouvée humaine, attentive, donnant toute son attention à la lettre de ma psy. J'ai parfaitement compris lorsque à la fin elle m'a dit qu'elle ne pouvait pas se prononcer, qu'elle allait écrire dans son rapport au comité médical que le passage devant un expert était nécessaire. Elle avait aussi dit avoir bien compris et bien noté mes explications, à savoir deux adaptations successives et contraires trop différentes et déstabilisantes. Elle m'avait dit au revoir avec beaucoup de gentillesse en me disant de ne pas m'inquiéter.

Bon, convocation chez un expert psy. Donc normal. Une recherche sur le net m'avait fait trouver qu'elle est l'auteur d'un livre sur les traumatismes psychiques. Bêtement je me suis dit "Ouf quelqu'un qui pourra peut-être me comprendre" C'était ce matin. Pauvre de moi.

La psy ouvre le dossier qu'elle a reçu de mon employeur et me lit ce qu'il y a dedans. Et notamment le rapport du médecin généraliste, super bref. Celle-ci n'y fait aucun état de ce que je lui avais dit. En revanche elle conclut en pensant que ma pathologie est sans rapport avec le service, mais plutôt à des composantes de ma personnalité ! Comment en tant que généraliste peut-elle affirmer un truc pareil ? Sur quoi se fonde-t-elle ?

1er choc.

La psy experte a lu à son tour le certificat détaillé de ma psy. Comme il y avait plusieurs passages qu'elle n'arrivait pas à déchiffrer, je lui ai proposé de jeter un oeil, elle a fait "Oh ça n'a pas d'importance".

2e choc.

Elle m'a ensuite posé quelques questions. Elle voulait absolument que j'aie eu des problèmes à l'adolescence, ce qui na pas été le cas. Sur le récit de mon vécu au travail elle a affiché un air très sceptique.

3e choc.

Elle a pris quelques notes à partir de quelques feuilles que j'avais écrites, mais ce qu'elle a noté correspond à des trucs vraiment pas intéressants. J'ai eu l'impression qu'elle était à l'affût de tout indice allant dans le sens de la généraliste du travail.

On n'a même pas abordé l'essentiel, du lien entre ce que j'ai vécu au travail et ma souffrance.

Zéro empathie.

Tout à coup elle s'est levée, on n'était même pas entrées dans le vif du sujet. Elle m'a dit qu'elle allait faire son rapport avec ce qu'elle avait. J'étais sous le choc, j'ai juste eu le temps de lui demander le sens qu'elle donnerait à son rapport. Elle a botté en touche du style "Je verrai quand j'aurai le temps" et m'a mise dehors en disant à peine au revoir. J'étais très choquée.

Cet après-midi j'ai pris rendez-vous avec un avocat.

Mes compagnes et compagnons de galère, courage !

[siobban]

Bonjour,

Petit message rapide pour te dire que je suis également effarée par ce que tu décris et cela ne me donne guère confiance en l'avenir.

Ma psychologue m'a déjà dit que je suis très exigeante envers les différents professionnels de santé qui se sont occupés de moi. Je croyais que l'écoute et l'absence de jugement étaient des savoirs-être inhérents à la profession de soignants... Ils ont beau être experts ou agréés, ils n'en restent pas moins des professionnels dotés d'une déontologie...

Courage à tous.

[bennou]

La reconnaissance en maladie professionnelle de la dépression est un parcours du combattant et voué à l'échec dans 95% des cas.

J'avais également envisagé de le faire, mais lorsque j'ai vu les jurisprudences de la Cour d'Appel Administrative près de chez moi, j'ai laissé tombé. Sur une vingtaine de jugements, un seul avait eu gain de cause ...

Bon courage.

[Ella75]

Merci Siobban, merci Bennou.

Je vais devoir devenir pugnace.

Comme l'a écrit un autre forumeur (pardon j'ai oublié le pseudo) sur des pages, peut-être anciennes, parcourues ici hier :
"Pas de guérison sans justice".

Je me refuse à admettre ce que sous-tend cette vérité que j'ai beaucoup entendue : "Quelqu'un d'autre que vous vivant la même chose au travail ne serait pas forcément tombé malade". Ah oui, certes et alors ? Ça sous-entend quoi ? Que ma maladie est sans lien avec le travail ? Si on va par là, parce que certains sont sortis vivants des camps de la mort, ceux qui y sont restés avaient des problèmes personnels ? J'espère que je ne choque personne avec cette comparaison qui peut paraître énorme et inappropriée, mais pourtant il y a un peu de ça. Si d'autres auraient pu traverser "ça" (je dis "auraient pu" car c'est une hypothèse hasardeuse vu que je suis seule au monde à avoir vécu "ça", ça étant ce qui m'est arrivé), vous n'aviez aucune raison de ne pas le traverser sans dommage vous aussi.
Vachement scientifique la psychiatrie !
Et terriblement humain.

[indigo10]

Bonsoir Ella,

Juste te dire mon soutien. On vit vraiment dans un monde de...

Fais attention à toi, de ne pas t'épuiser...
Je pense que la réponse de Bennou est hélas très juste.

Et étant du "métier" ( plus pour longtemps j'espère) , j'en ai vu et entendu aussi...

Amicalement.
Indigo.

[Ella75]

Bonjour à toutes et tous, et plus particulièrement à Siobban, Bennou et Indigo 10,

Pas de nouvelles ni du psy expert mandaté par mon administration (cf. post ci-dessus) ni de mon administration elle-même. Aucune illusion. Juste peur de l'état où me jettera la réception du refus. C'est pour ça que je prends les devants et que je suis allée voir un avocat.

Ce qu'il m'a donné comme conseil :

Quand je recevrai la notification du refus de reconnaissance de l'imputabilité, si le rapport de l'expert n'est pas fourni avec cette notification de refus, il me faudra demander ce rapport du psy-expert à mon administration. Et là la seule chose opposable alors serait la production d'une contre-expertise obtenue auprès d'un autre expert psychiatre. L'avocat m'a recommandé deux experts psychiatres. Le défi sera d'obtenir une expertise établissant que ma pathologie est en lien direct et certain avec le service. Si j'arrive à obtenir ça, les choses ne seront pas gagnées loin de là, mais ça obligera l'administration à reconsidérer le dossier dans le cadre d'un recours soit gracieux, soit contentieux. L'avocat m'a dit aussi de bien expliquer à l'expert que j'aurai besoin qu'il puisse m'accompagner en commission.

Evidemment c'est comme de décrocher la lune :
1) Parvenir à convaincre suffisamment un psychiatre inconnu de ma "contamination mentale" par une situation assez compliquée et très ancienne afin qu'il établisse le fameux lien direct et certain.
2) Lui demander, en plus, de se rendre disponible pour une convocation pour m'accompagner ou me représenter à une commission dans mon administration, sachant que ça peut tomber n'importe quand, y compris un 13 juillet ou un 16 août.
L'avocat souligne le fait que je peux me recommander de lui auprès de ces experts, et qu'ils pouvaient le contacter. Chose que j'ai'appréciée, en même temps je trouve que cet avocat s'engage un peu légèrement puisqu'il ne m'a vue qu'une heure, et qu'il n'a aucune preuve de mon histoire.

Mais voilà au milieu de tout ce qu'il m'a dit, c'est l'essentiel : le conseil de parvenir à décrocher une expertise contradictoire. Cette dernière constituerait la preuve permettant ensuite seulement, si la commission n'entendait pas l'avis de la contre-expertise, l'intervention de l'avocat. C'est du lourd, mais ça me fait un truc vers lequel me projeter, un os à ronger. Ca me fait un peu respirer.

Demain je vais essayer de joindre ces deux experts, en espérant qu'ils soient joignables, et non en mode "le docteur X. ne prend plus de nouveau patient". Enfin c'est pas du tout gagné. Et puis financièrement je me demande comment ça se passe, le médecin expert qui se déplacerait a besoin d'être défrayé...

Et il me reste à bosser mon dossier comme une dingue, pour faciliter la compréhension rapide de toute mon affaire par un de ces psys experts.

En conclusion, pas très encourageante, l'avocat m'a tout de même conseillé, lui aussi, un peu comme toi Bennou, de tenter guérir sans la justice, que la justice se fait toute seule de toute façon.

Je ne me fais pas d'illusion, il y a un énorme risque de me prendre des refus de tout côté, de m'entendre dire que je me suis rendue malade toute seule. Je vais tenter d'avancer et de me faire entendre quand même. Sans m'épuiser. Ou avant de m'épuiser.

Peut-être il y a là des infos pour d'autres, c'est pour ça que je vous en fais part.

Bon dimanche à toutes et tous

[Ella75]

Je continue mon journal de bord.

J'ai fait chou blanc avec les deux psys recommandés par l'avocat. Ils ont assez de dossiers, et refusent les expertises à titre privé, c'est-à-dire autres que celles demandées par un tribunal. Impossible de seulement décrocher un rendez-vous. Je tombe donc sur le méchant os dont tu m'avais parlé il y a quelques mois Bennou. Une expertise n'est donc possible que commandée par un tribunal. Comment obtenir une chance d'exposer correctement mon histoire à un expert qui accepterait de prendre le temps ?

J'ai bien obtenu un rendez-vous avec un autre expert, mais c'est sans avoir annoncé la raison précise de ma demande. Je m'attends à une fin de non-recevoir aussi.