Fermant les yeux, je me suis figuré faisant partie de la faune. Transformé en faucon, j'ai fendu le ciel jusqu'au plus hautes frondaisons, j'ai visité les plus belles falaises et aux premiers frimas, frigorifié, j'ai filé jusqu'en Afrique.
J'y ai foulé le sable fin du Sahara et suis devenue fennec. J'ai écouté le faible frémissement des dunes, frissonnant d'émotion à la voix flutée du désert. Frappé par cette beauté fantomatique, je me suis fossilisé dans le sol friable.
Fatigué, fourbi, je me suis effondré. A mon réveil, je retrouvais des forces. Ma fourrure resplendissait d'une foultitude de rayures de feu, ma pupille n'était plus qu'une fine fente verticale, ma voix un feulement féroce. J'étais un félin, fier et fort.
Mais pas le temps de m'affaler au soleil, la faim me forçait déjà l'affut. Ma fine olfaction me fit facilement repérer un phacochère affaiblit. En une fraction de seconde je fondais sur la femelle affolée quand un frelon frondeur fixa son dard dans ma fourrure.
D'un coup de griffe je faisais fuir l'importun qui venait de me faire perdre la face, et mon festin. Finalement, je me contentai d'un frugal frichti, humilié en mon for intérieur.
J'en avais assez de fanfaronner par ma force. Je finis par comprendre que la finesse de la fourmi ou du faucheux n'avait rien d'une faiblesse et m'imaginais dans un corps fluet et filiforme.
C'est ainsi que je me suis retrouvé affublé de longues pates frêles, filtrant la vase d'une flaque fréquentée par une foule de flamands roses. Je frimais encore, tel un fragile édifice dissimulé derrière un plumage flamboyant. Mon fantasme de petitesses s'était heurté à la faiblesse de mon humilité. Au fond, j'avais encore fort à faire pour me départir de ma suffisance feutrée.
Au loin, un bruissement de feuilles trahissait un jeune faon fougueux. Instinctivement, je me figurais déjà frayant dans la forêt tel un cerf aux fabuleux bois. Orné de mon trophée, je paradais une fois de plus avec fatuité.
Faisant fi de l'hypertrophie de mon égo, je réalisais avec affliction la fragilité de mon être, contraint de feindre la force par des fantasmes emplis de faste et de fausseté.
Finalement, j'ai fui dans la peau d'une fouine effarouchée, à moins qu'il ne se soit agi d'un furet ou d'une moufette futée...
Doloplus
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