Précocité, différence dans l'enfance et dépression

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Gavroche
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Gavroche »

Salut

Je poste ici car il y a un truc que j'ai eu du mal à cerner : pourquoi je suis en dépression ? Comment j'en suis arrivé là ? Comment peut-on se laisser entrainer dans une spirale infernale suite à un deuil sans se rendre compte que quelque chose cloche ? Comment se tirer de là ? Ces questions me sont récurrentes chaque fois que je perds le contrôle de mes pensées et étant donné que je part du principe que mieux comprendre cette maladie est un plus pour avancer dans le processus de guérison, il est important pour moi d'avoir des réponses...

Avec beaucoup de recul, j'en ai déduis que ma dépression n'était pas directement due à une succession de deuils et j'ai de plus en plus l'impression que les véritables causes m'ont été "innées", avec une période de latence sous forme d'anxiété anormale et ce depuis tout petit. Un diagnostic de précocité ne m'a pas été particulièrement destructeur sur le plan relationnel avec les autres enfants, étant donné la classe miracle où j'ai été atterri, mais je me suis toujours sentis "différent", marginalisé malgré tout et très souvent incompris par mon entourage (parents, professeurs, camarades, etc...). Et même si j'avais accepté ma différence, même si j'avais quelques amis qui m'acceptaient tel que j'étais, mon anxiété persistait à l'idée de passer à côté de la norme de manière générale, de réfléchir sans cesse de tout sans même en avoir conscience, ni en laissant place à la moindre insouciance.

Un cadeau empoisonné qui m'est insupportable 24h/24 depuis que cet anxiété a tourné en dépression, j'aimerai avoir quelques témoignages voir si beaucoup d'entre vous est concerné ici par ce problème, et éventuellement comment certains font pour apprivoiser leur différence (quelle qu'elle soit) et comment ils réussissent à vivre dans l'insouciance. Cela permettrait également à certain de mieux comprendre leur cas, et surtout si cette maladie était directement liée à cette façon d'être : j'ai entendu dire que beaucoup de précoces finissaient par mal tourner et je ne veux pas qu'il m'arrive la même chose...
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Lutéa
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Lutéa »

Bonsoir Gavroche,
j'ai une double singularité, tournure d'esprit (dont tu jugeras dans quelle mesure elle peut être rapprochée de la précocité) et maladie génétique évolutive ayant débouché notamment sur une malentendance sévère.

J'ai ce qu'on appelle un "schéma d'isolement social" dans la classification de Young, c'est-à-dire que je me perçois comme différente des autres, sans que ce soit un sentiment de supériorité ou d'infériorité systématique.

Lorsque j'étais enfant, j'étais beaucoup plus "mûre" que mon âge, mais ce n'était pas seulement intellectuel, c'était aussi une question de sensibilité. C'est la raison pour laquelle je ne sais pas si je peux dire que j'étais "précoce". Evidemment je m'entendais assez peu avec mes "camarades" et mieux avec les adultes, et j'ai dû batailler pour ne pas être le bouc émissaire que tout le monde maltraite parce qu'il leur apparaît comme "intello" et parle différemment des autres.

Mais l'endroit où le bât a le plus blessé va peut-être te surprendre : quand on s'investit dans un domaine de la connaissance en étant assez jeune, on n'imagine pas tous les enjeux que les gens, et plus généralement les insitutions, font porter sur ce domaine et qui n'ont aucun rapport avec lui : influence, argent, reproduction sociale ... bref, les jeunes qui croient ce qu'on leur dit (qu'ils ont un bel avenir dans la discipline en question) ne se rendent pas compte que ceux qui les entourent (sauf parfois la famille) se fichent pas mal de la beauté d'un solo de violoncelle ou d'une théorie mathématique, mais souhaitent les utiliser.

Mon expérience me souffle donc la réponse suivante à ta question : les personnes qui ont plus de recul que leurs congénères du même âge ou s'intéressent à des sujets moins immédiats ont forcément un sentiment de différence ; les institutions s'efforcent de les utiliser et les isolent encore plus du monde courant (sans compter qu'on les place dans une logique de compétition) ; l'arrivée à l'âge adulte et donc le retour à une certaine "normalité" est parfois extrêmement dure. Mais il n'y a pas de fatalité, on peut sortir de ce rôle.

Est-ce que je parle bien de la même chose que toi, ou suis-je complètement à côté du sujet ?
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elenka26
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Enregistré le : lundi 09 mai 2011 23:03

Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par elenka26 »

Pour ma part je n'ai jamais été précoce mais marginalisée par ma mère avec qui j'ai vécu apres le divorce de mes parents, quand j'avais 10 ans. Je revais beaucoup de "la norme", ce qui pour moi à l'adolescence était la vie des autres de ma classe notamment des copines dont les parents me semblaient tellement plus normaux que ma mère. Je vivais une vie etriquée avec une mère enfant et vieillote en même temps, phobique sociale, au chomage pendant 8 ans et anciennement femme au foyer donc sans connaissance du monde du travail, peu affective encore moins demonstrative mais constament sur mon dos, souffrant ce que je comprendrais plus tard de troubles de l'empathie...j'ai été marginalisé par le manque d'ouverture sur le monde exterieur et ses problèmes psychologiques. J'etais sans doute le contraire de precoce, moyenne à l'ecole parce que je travaillais beaucoup, mais surtout totalement deconnectée des realités de la vie, c'etait cela ma difference! j'ai sombré dans la depression à l'arrivée en fac, qui representait pour moi la fin de l'enfance, de la structure et l'encadrement scolaire, il fallait maintenant etre grande et me preparer à la vie active, ma vie normale!
Je n'en ai toutours pas fini avec la norme, celle de vivre en couple avec des enfants! mais avec le temps on s'accepte davantage, on cherche moins il me semble à être comme tout le monde...

"mon anxiété persistait à l'idée de passer à côté de la norme de manière générale" demande toi pourquoi, qu'est ce qui t'attire dans cette norme, qu'elle est-elle? prend celle qui te semble être un véritable besoin, s'il s'agit d'une reconnaissance sociale indispensable? mais laisse le reste, celle qui serait contraire à tes principes, à tes idées, qui te dénaturerait ...
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Gavroche
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Enregistré le : dimanche 01 mai 2011 21:17

Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Gavroche »

Merci pour vos réponse :)
J'ai une double singularité également : l'un est le fait de "penser visuel" (à ne pas confondre avec mémoire visuelle, qui n'a strictement rien à voir) et l'autre, qui est plus dans le domaine musical est l'oreille absolue (qui peut à mon avis être rattaché à ce mode de pensée puisque je "vois" la hauteur d'un son environnant et détermine la note exact). Je tiens à préciser que contrairement à ce que l'on croit généralement, il s'agit non pas d'une supériorité intellectuelle mais d'une manière différente de percevoir les choses, qui offre tant d'avantages que de handicaps (et encore je ressens plus de handicaps de mon côté que d'avantages ) et c'est la raison pour laquelle le "schéma d'isolement social" s'applique à beaucoup d'entre nous, si ce n'est tous.
Lutéa a écrit :
Lorsque j'étais enfant, j'étais beaucoup plus "mûre" que mon âge, mais ce n'était pas seulement intellectuel, c'était aussi une question de sensibilité. C'est la raison pour laquelle je ne sais pas si je peux dire que j'étais "précoce".
Contrairement aux idées reçu, la sensibilité et l'empathie sont parmi les choses qui caractérisent le plus un EIP, donc le terme de "précocité" dans ton cas n'est pas à exclure ^^.
Lutéa a écrit :
Mais l'endroit où le bât a le plus blessé va peut-être te surprendre : quand on s'investit dans un domaine de la connaissance en étant assez jeune, on n'imagine pas tous les enjeux que les gens, et plus généralement les insitutions, font porter sur ce domaine et qui n'ont aucun rapport avec lui : influence, argent, reproduction sociale ... bref, les jeunes qui croient ce qu'on leur dit (qu'ils ont un bel avenir dans la discipline en question) ne se rendent pas compte que ceux qui les entourent (sauf parfois la famille) se fichent pas mal de la beauté d'un solo de violoncelle ou d'une théorie mathématique, mais souhaitent les utiliser.

Mon expérience me souffle donc la réponse suivante à ta question : les personnes qui ont plus de recul que leurs congénères du même âge ou s'intéressent à des sujets moins immédiats ont forcément un sentiment de différence ; les institutions s'efforcent de les utiliser et les isolent encore plus du monde courant (sans compter qu'on les place dans une logique de compétition) ; l'arrivée à l'âge adulte et donc le retour à une certaine "normalité" est parfois extrêmement dure. Mais il n'y a pas de fatalité, on peut sortir de ce rôle.

Est-ce que je parle bien de la même chose que toi, ou suis-je complètement à côté du sujet ?
Cela ne me surprend pas, j'ai perdu 2 ans d'étude peut être à cause de ça (d'ailleurs c'est un peu ce qui a aggravé mon état dépressif) mais le réel gâchi n'est pas là...
Beaucoup d'EIP ne sont pas dépistés ou ne sont pas traités suffisamment à temps pour leur éviter le paradoxe : celui de ne pas suivre à la lettre le programme d'apprentissage que nous exige le système éducatif et de leur conduire parfois à l'échec... sans même avoir le moindre doute de leurs réels capacités. Quelques chiffres qui peuvent surprendre (cogitoz.com) :
"45% des enfants surdoués redoublent.
20% s’arrêtent avant le bac et parmi les bacheliers, 17 % font des études médiocres.
En 2003, 20% des adolescents hospitalisés en psychiatrie à l’Hôpital de La Timone à Marseille, étaient surdoués."

Autant vous dire que la plupart ne soient pas en excellente santé mentale et ça ne m'étonnerai pas qu'on ne soit pas les seuls concernés ici dans ce forum.

@elenka26 : Il ne suffit pas d'être le contraire de précoce pour rester moyen en bossant, j'en connais pas mal qui bossent comme des acharnés mais qui pourtant ont un niveau très médiocre
Pour ma part, c'est pas le fait d'être comme les autres que je veux, c'est vivre comme les autres. Juste le fait de ne pas percevoir les même choses que les autres et d'être hyper sensoriel qui me donnent cette pénible sensation d'être différent, mais je reste convaincu que c'est cette dépression qui me bousille le plus désormais

EDIT : Ceux qui sont concernés par la différence quelle qu'elle soit n'hésitez pas à faire part de votre expérience, la précocité est juste un exemple ^^
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Lutéa
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Lutéa »

Bonjour Gavroche,

j'aurais de nombreuses choses à dire sur la normalité, mais je dois les mûrir.

Je voudrais que tu nous parles un peu plus en détail de la façon dont tes particularités ont affecté ta vie - as-tu été passionné par un art ? De plus, je m'étonne que de ton passage dans une école spécialisée, dont tu dis qu'il a été positif, tu n'aies pas gardé quelques amis très chers eux aussi "singuliers" avec lesquels aurait pu s'établir une fidélité à toute épreuve très précieuse dans les moments critiques.

Je voudrais aussi savoir comment se sont comportés tes parents. Ont-ils cherché à dialoguer avec toi, ou simplement à "gérer" ?

Sinon, je sais que tu vas crier à l'idée reçue, mais parfois je jalouse tous ceux dont le cerveau possède des "raccourcis" (représentation visuelles, synesthésie, absense de conceptualisation par exemple chez les autistes qui leur permet de restituer fidèlement une scène ou un morceau de musique ...). De ce point de vue, j'ai toujours eu l'impression d'avoir la sensibilité nécessaire pour interpréter voire créer, mais pas les moyens techniques - dont je m'imagine bien sûr qu'ils tiennent plus de l'inné que de l'acquis !
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Gavroche
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Message par Gavroche »

Bonsoir Lutéa, j'ai eu pas mal de critères qui me classaient hors de la norme en effet, à commencer au tout début par une dysphasie, qui s'accompagnera d'une légère dyslexie et d'une dysgraphie... des troubles rapidement corrigés par un traitement orthophonique précoce. Après le diagnostic, mes parents n'ont jamais pris la peine de m'expliquer mon cas, ma différence. Mes troubles m'ont été corrigés et mon "haut potentiel", synonyme de brillance et de réussite dans tout ce que je pouvais entreprendre ne pouvais qu'être avantageux et ne nécessite donc pas de prise en charge particulière. Oui tu penses. A peut de chose près je suis quelqu'un de normal et je devrais donc être élevé tel un gosse des bacs à sables, courant partout et jouant dans les prairies sans avoir la moindre conscience que dans l'herbe et le sable, il y a tout un monde.

Mes parents peinaient à me comprendre lorsque je posais des questions sur la biodiversité, l'univers, l'existentiel ou encore le pourquoi du comment de la chose, qui leurs posaient systématiquement une colle, et ne se contentaient que de me laisser des bouquins, des casses-tête ou tout autre jeux demandant de la reflexion m'ouvrant les portes à l'isolement. Je commençais déjà à juger la qualité de leur pédagogie parentale et leur incapacité à "m'apprivoiser" et je crois que c'est pour ça qu'encore aujourd'hui les relations que j'ai envers mes parents sont glaciales.

En ce qui concerne ma scolarité j'ai pas été dans un enseignement spécialisé, j'ai eu droit à une scolarité normal et ennuyeuse dans un petite école privée banale. Une bonne classe cela dit, ma différence n'a que rarement sollicité des moqueries, qui tendaient à venir de l'extérieur. Des gosses normaux en sommes, posés et n'ayant aucune singularité particulièrement (sauf exception extrême ). En cours, je m'ennuyais ferme, je peinais à rester en place et à suivre le cours sans décrocher car je savais déjà que je perdais mon temps. Les rares questions qui m'étaient utile de poser embarrassaient le prof, une chose qui m'amusait, et m'encourageait à me révolter contre l'ignorance.

Je lisais beaucoup de revus scientifiques, j'étais particulièrement fasciné par la biologie, la biodiversité de cette terre et son écosystème. J'apprenais des cartes de géo par coeur, l'état naturel de chaque pays et les sujets humanitaires qui y étaient associés. Mes intérets étaient divers, cela allait de l'astronomie à l'histoire de notre terre, en passant même par la robotique. Mon excentricité était accueillis certe mais je la repoussais... j'appréciais les autres et pourtant je me laissais difficilement aimer, beaucoup de choses me paraissaient étranger en eux. A la fin du primaire, j'étais devenue une encyclopédie ambulante, un bourreau potentiel avec un répertoire filmographique et musicale très pauvre et qui en plus ne savait toujours pas faire ses lacets.

Depuis, beaucoup de chose on changé mais je me rend compte maintenant que j'ai été victime du complexe de l'albatros... Je me sens souvent borné, je perd la logique des choses simple et je ne cesse de me décevoir de mes résultats scolaire

Bref je vais revenir sur ce qui faisaient ma différence :
-je suis gauche et maladroit
-quand je pose des questions aux gens, j'ai tendance à les poser en énigme et à chercher à lire dans leurs pensées
-je préférais la compagnie des adultes ou des gens mûr, voire même plus jeune, et j'avais tendance à éviter les baltringues de mon âge avec qui j'étais mal à l'aise
-j'ai toujours été empathique, altruiste, hypersensible et sensitif. J'arrive à me mettre dans la peau de n'importe qui et je sais parfaitement comment telle et telle personne fonctionne
-je "vois" toujours la solution la plus pertinente au probleme, souvent d'une manière intuitive mais je peine à en trouver le raisonnement qui m'y a conduit
-j'ai du mal à me laisser aimer, je suis de nature distant et pourtant j'ai un esprit de bienveillance...
-j'ai parfois l'air très froid mais j'ai en réalité beaucoup de mal à détester quelqu'un, je me pose plutôt des questions sur les raisons de sa façon d'être lorsque qu'un type a l'ambition de me faire du mal
-je peux passer des heures à réflechir, rêvasser, à méditer sur un sujet, un problème ou encore me tourner un film dans ma tête etc...
-je suis très sensible aux arts, et en particulier dans le domaine musical, je peux reconstituer de toute pièce un morceau (d'ailleurs ya une sorte de mini chaine hifi greffé au fond de mon cerveau et elle ne s'arrête presque jamais )
-je retiens très mal les prénoms, les noms des personnes mais j'ai une mémoire très "photographique"
-je suis très perfectionniste et je supporte très mal la moindre échec
-j'ai une écriture très laborieuse, je met énormément de temps à classer mes idées et à les argumenter, de plus j'ai toujours des traces de dysgraphie avec une tendance à mélanger les mots
-j'ai souvent eu des tics (comme me lisser les cheveux ou coulisser ma mâchoire)
-j'angoisse lorsque je dois aborder quelqu'un d'inhabituel (voire même un ami), je dois préparer longtemps mon texte etc...
-et surement d'autres...

En ce qui concerne la pensée visuelle, je m'interroge beaucoup sur mon cas...
Autisme de haut niveau ? Syndrome d'Asperger ? Trop bon acteur pour le cacher si tel était le cas. Mais alors pourquoi cette perception différente ? Comment avoir été précoce avec à l'origine une dysphasie ? Comment se fait-il que je dois m'appuyer sur des astuces pour paraitre normal ?

Cela dit je ne te cache pas que j'aimerai m'appeler Daniel Tammet des fois
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Lutéa
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Message par Lutéa »

Bonjour Gavroche. Tu as écrit tard hier, peut-être n'es-tu pas encore réveillé ?

Il y a certainement du Daniel Tammet en toi, mais il est probable que tu n'as pas été bien entouré et que tu n'as pas encore trouvé la voie qui te permettra d'harmoniser tes aspirations avec la vie en société.

Je n'y connais pas grand-chose en matière de fonctionnement cérébral, mais ce que je sais et dont je suis sûre, c'est que l'apprentissage scolaire est extrêmement réducteur. Il fait appel à plusieurs facultés, mais qui à mon avis ne sont pas essentielles, surtout en regard de l'importance qu'il revêt dans la vie des gens ... aggravée par la culture du diplôme qui sévit en France. Il est par ailleurs évident que les programmes sont faits pour permettre une assimilation facile par la majorité des gens, lesquels sont déjà préformatés par ledit système scolaire. Il n'existe pas qu'une seule façon d'aborder les choses.

J'ai un ami que j'aime énormément et qui est très étrange. C'est un brillant mathématicien né dans une famille juive allemande, dont l'un des frères est atteint d'une forme grave d'épilepsie. Je ressens en lui ce que tu décris : un coeur généreux et une grande sensibilité, et en même temps une incapacité totale à la faire passer dans les faits. Les relations avec lui sont très difficiles, parce que de mon côté je ne ménage pas les marques d'affection et que souvent il me répond sur un ton administratif ou se comporte comme s'il était indifférent. Je me sens souvent blessée, parfois je m'interroge pour savoir si je l'aime vraiment ou si je cède à la fascination qu'exerce sur moi l'intelligence et à un certain masochisme (je me sens inférieure sur le plan intellectuel, je ne sais pas jouer aux échecs, etc.). Sans compter que je ne sais pas le soulager lorsqu'il souffre.

Je ne sais pas si l'on peut avoir une vie intérieure très riche et vivre bien parmi les autres en même temps. Je pense être au seuil entre deux mondes, ni surdouée ni capable de me mettre en valeur en utilisant les attentes et les illusions des autres. Du coup je me sens frustrée des deux côtés, mais en même temps je peux comprendre ceux qui sont absorbés par leur monde intérieur (qui bien souvent renvoie à la connaissance du monde extérieur ...) et ceux qui ont besoin de mettre la télé ou la radio en sourdine pour ne jamais être seuls avec eux-mêmes parce que leur âme est vide sans l'action.

--edit--

(entre nous je dois faire ma première présentation Power Point qui traîne depuis un mois, mais je sèche car ce mode de présentation ne correspond pas du tout au cheminement de ma pensée ...)
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Gavroche
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Message par Gavroche »

Bonsoir Lutéa,

j'ai farfouiller un peu partout sur le net et dans mes souvenirs d'enfance, et à mon avis il est fort probable que je sois Asperger...
Un point positif cependant : j'ai eu la chance d'avoir reçu une éducation adéquate malgré l'indifférence de mes parents. J'ai aussi eu la chance d'avoir eu affaire à des gens formidables et d'avoir été "socialisé", ce qui n'est malheureusement pas le cas pour bon nombre d'aspergers... Une chose avec lequel je peux me réjouir car cette singularité ne se remarque plus et demeure latente à l'intérieur de moi, au profit de quelques particularités sensitif et intuitifs

Cependant me voila aujourd'hui dans une autre prison qui me ruine beaucoup plus : la dépression... Mais bon si j'ai vaincu le syndrome d'Asperger alors pourquoi pas le syndrome dépressif ?

En ce qui concerne ton ami, je ne pense pas qu'on puisse parler de masochisme, la plupart des Aspergers paraissent surdoués et aiment montrer leur intelligence, plus particulièrement dans leur domaine. Céder à son intelligence est donc une bonne chose, que tu te sentes bornée ou pas, parce qu'en général ils aiment bien discuter avec des gens qui veulent apprendre. Ils sont juste un peu pomés sur la manière de faire dans les relations pour la simple raison que c'est pas leur instinct qui leur apprend à être "comme les autres", ils doivent l'apprendre "scolairement". Il n'y a rien de mysanthrope, ni de désintéressement à ton égard, je te préviens juste que si ton attirance est réciproque, il ne saura pas forcément le montrer clairement et paraitra indifférent sans pour autant qu'il le soit réellement

Tu dois présenter quoi ?
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Lutéa
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Lutéa »

Je devais présenter Victor Hugo, L'Homme qui rit et deux passages, le tout en 10-15mn. Mission impossible. Mais je suis en train de décrocher en ce moment, je ne suis pas allée en cours hier.
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Gavroche
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Gavroche »

Je ne suis pas vraiment une lumière en tout ce qui concerne la littérature et rédaction, mais il y a une chose importante que tu dois appliquer pour ton projet : le commentaire (soit la bête noire pour moi ). Il ne s'agit pas là d'une rédaction linéaire, mais de dégager tous les sens du texte et de les classer en parties/sous-parties et pour cela tu dois utiliser des outils d'analyse technique (fiche méthode). Tu peux aussi t'inspirer des commentaires en vogue sur le net même si tes capacités de rédaction ne laissent aucun doute.

C'est une présentation orale, n'hésite pas en présentant de blablater un peu sur le contexte de l'époque, sur ce qu'a inspiré ce personnage
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Mélina
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Mélina »

Bonjour Gavroche,

Je me permets d'intervenir. Ma situation est différente de la tienne, mais peut-être cela pourra te donner des pistes.

Enfant dite "surdouée", j'ai suivi le système scolaire pendant quelque temps sur la base d'un compromis: je suis restée dans le système scolaire normal avec un an d'avance. Mes parents m'ont laissé choisir. Je n'ai pas voulu aller dans une école spécialisée, et j'ai refusé de sauter plus d'une classe. Je suis allée jusqu'au bac, mais je dirais que ce "compromis" a tenu jusqu'en seconde. A cette période, je suis devenue alcoolique et j'ai terminé mon cycle secondaire sans aller en cours. Ceci dit, j'ai toujours eu beaucoup de difficultés dans mes relations avec le système scolaire, et avec les autres au lycée.

Ce compromis n'a pas vraiment tenu parce que je ne recevais pas assez de connaissances à ingurgiter, mais aussi parce qu'il manquait à ma réceptivité aux émotions la maîtrise que donne le vécu. J'avais a priori une importante maturité émotionnelle, mais en fait je n'avais pas les outils adéquats pour la gérer. Sans compter que ma tendance à la rationnalisation, si elle me permettait de comprendre mes émotions, de les objectiver, m'empêchait de les vivre.
Et puis la capacité logique conduit à remettre en cause tous les systèmes moraux comme relatifs, comme de simples perceptions, alors que l'être humain n'est pas capable d'assumer le réel en dehors d'un système de valeurs aussi illusoire soit-il. Mais cela je ne le savais pas. Je confondais capacité à rationnaliser et capacité à vivre. Je considérais les limites affectives comme des limitations, des enfermements de l'être humain. Alors que c'est une des conditions de l'existence, de la définition de l'individu. Sans compter que c'est aussi une des ruses de la raison pour enfermer les émotions, ne pas les vivre.

Tout comme toi, j'ai du mal à organiser ma pensée: appréhension analytique des choses, avec des difficultés à organiser ma pensée. Pour ma part, c'est une pensée en domino, par enchâssement. (Bon, aujourd'hui, j'ai aussi du mal à organiser ma pensée parce que j'ai détruit beaucoup de ses capacités avec mes divers excès et addictions...)
A l'inverse de toi, j'ai eu une maîtrise du langage très précoce, orale et écrite, et j'ai conservé une certaine facilité à m'adapter comme de façon intuitive à un système langagier, à ses structures et ses mécanismes. Mais, sincèrement, ce point reste encore très obscur pour moi.

Enfant, j'appréhendais les choses selon deux pôles opposés, juxtaposés et qui se rejoignaient rarement: très émotive d'un côté, de l'autre une tendance à la rationnalisation extrême.
Il semblerait que j'ai développé cette part rationnalisante pour me protéger de cette émotivité justement. A priori quelque chose qui se rapprocherait de ce que Winnicott appelle le "faux self".

Aujourd'hui, j'ai une tendance à enfermer la part émotive et n'avoir conscience que de la part rationnalisante. J'ai vécu de longues périodes en mode automatique avec un personnage très bien construit, a priori sans problème, mais sans accès à mes ressentis. Ce qui m'a conduit à l'adolescence à provoquer sans doute une sorte de dépression. Et ce qui m'a fait longtemps vivre avec une sensation de n'être jamais en présence immédiate, en relation avec les autres. Ma distance intérieure aux autres m'a également conduite à culpabiliser de ce que je suis et, dans le même temps, je rendais les autres responsables de ma sensation de différence. J'oscillais sans cesse entre une sensation d'être une handicapée de l'existence, et une tendance à être présomptueuse dans mes affirmations. Ce qui m'arrive encore d'ailleurs. J'ai des difficultés à agir dans une juste mesure à cet égard.

Il reste que tout cela m'a conduit dernièrement à en développer une, de dépression, là, de façon certaine, parce que j'en suis arrivée à une sorte de "mort affective".

Aujourd'hui, je vais mieux, même si je reste très maladroite dans ma façon de prendre en charge mes émotions. Je suis devenue très hésitante dans mes relations avec les autres. Et je suis assez facilement bouleversée par des choses parfois anodines. Je suis contente cependant de vivre dans un rapport bien plus immédiat au présent.
La thérapie que je suis a consisté pour moi à sortir mes émotions de leur bunker. Par contre, je dois aussi avouer que je n'ai pas fait cette démarche de moi-même au départ. A la suite d'un choc, tout a implosé à l'intérieur et je n'ai pas eu le choix que de tenter de définir mes émotions et de les prendre en charge. La dépression était déjà là en fait, mais je ne le savais pas. Le seul signe que j'en avais était l'absence d'émotions.

D'ailleurs, j'ai eu tendance par le passé à me mettre en danger pour faire exploser mes murs intérieurs.

Voilà, comme je te le disais, ma situation est différente de la tienne, mais peut-être cela te donnera-t-il des pistes.
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Lutéa
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Message par Lutéa »

Mélina,

l'ami dont j'ai parlé un peu plus haut te ressemble, a priori. Il dit "jouer à l'être humain" et "porter des masques" et il en souffre. Cependant, pour ce que j'en sais, il a eu une scolarité brillante mais normale. En revanche, il se protège massivement à coups de rationalité.

L'isolement social dont nous avons souffert tous les trois à divers degrés vient très certainement en partie de notre esprit critique (tu parles de relativisme des valeurs humaines). Pour ma part, les gens qui mettent toute leur énergie à servir ces valeurs suscitent en moi des émotions diverses : exaspération (ce sont typiquement eux qui font souffrir les autres en assénant leurs préjugés imbéciles), mépris (parce que je ne comprends pas qu'on puisse être aussi borné) et envie (parce que je me dis que ma vie serait bien plus simple si j'obéissais au désir de conformité comme un bon toutou).

Dans mon cas, à cet isolement s'ajoute le handicap (malentendance). J'avais donc une double raison de cultiver la singularité et de me murer dans une orgueilleuse tour d'ivoire pour compenser mon infériorité objective.

Je pense qu'il n'est pas nécessaire de se sentir appartenir à un groupe d"un point de vue social pour avoir de l'empathie pour les gens et se permettre d'exprimer ses émotions envers eux. Il y a systématiquement une petite voix critique en moi, qui juge, qui compare, et je ne me sens pas semblable aux autres, même à mes amis les plus chers. Pourtant elle ne va pas jusqu'à critiquer les gens en eux-mêmes (plutôt leurs paroles, leurs habitudes, etc.), et cette mesquine petite voix ne m'empêche pas de les aimer. Je ne suis pas spontanée, mais je m'arrange pour faire passer ce que je ressens de manière différée.

Je pense aussi que le repli sur soi n'est pas lié uniquement à cela, mais aussi à l'ambiance familiale. Je suis enfant unique et mes parents sont des gens très sérieux, très anxieux, assez misanthropes, peu spontanés et pas très portés sur la joie de vivre. L'ami dont j'ai parlé, encore lui, a vécu une adolescence très difficile en raison de la maladie de son frère, et pour ce que j'en ai vu, ses parents ne doivent pas être des marrants non plus ...
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Mélina
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Message par Mélina »

Bonjour,

Ton message a suscité de nombreuses réactions en moi Lutéa. Je vais tenter de "synthétiser"... (pas gagné).

J'aurais tendance à penser qu'un isolement affectif premier, qui se situe selon moi tôt dans mon développement personnel, a développé chez moi cette tendance à la rationnalisation, que je distingue d'ailleurs de l'esprit critique. Tout cela est sans doute le fruit de ma place dans ma famille, et de la façon dont je me suis débrouillée avec les affects que j'ai alors ressenti, et la façon dont les relations se sont nouées dans ma famille. Puis rationnalisation et isolement affectif se sont nourris l'un l'autre, dans une relative absence de prise en considération de mes émotions.

Quant aux personnes qui, comme tu le dis, "mettent toute leur énergie à servir des valeurs", j'ai longtemps eu les mêmes ressentis que toi vis à vis d'eux. Aujourd'hui, mon regard et mon ressenti sont bien plus nuancés. D'une part, j'ai pris conscience que ma vision de personnes qui semblaient vivre de cette façon était assez schématique, et finalement assez imaginaire: chaque personne se débrouille comme il peut avec ses ressentis, ses ambiguïtés, ses valeurs, avec ses dosages personnels.
Je me suis rendue compte qu'un système de valeurs est aussi fonction des besoins et des désirs de chacun. J'ai compris que mon relativisme n'était pas seulement la résultante d'une capacité à réfléchir, mais aussi le signe le signe d'une absence de prise en considération de mes ressentis, et une volonté de les dérober aux regards des autres parce que je ne les assumais pas.
Que la liberté au sens autonomie et épanouissement consistait davantage dans le fait d'assumer mes ressentis et d'agir en fonction de ceux-ci, plutôt que d'une bataille à mener sur le plan des valeurs, bataille qui n'était au final que la partie émergée de l'iceberg, et qui était en partie une bataille imaginaire.
A partir du moment où j'ai commencé à connaître ma singularité, à vivre en fonction d'elle, la masse informe de moutons anonymes avec laquelle j'étais incapable de vivre s'est transformée en plusieurs individus, chacun différent, chacun avec ses désirs et ses doutes, et partant ses propres valeurs. J'ai commencé à saisir la singularité de chaque personne, à entrer en relation avec chaque être humain. Et j'ai cessé de juger la masse, de l'affronter ou de ressentir un désir aveugle de lui appartenir. C'est aussi à partir de là que j'ai cessé de ressentir mon isolement affectif.
Mais je reste "fragile" de ce côté-là. Une blessure réactive très vite mes mécanismes de défense, la confiance et le sentiment de partage peuvent très vite être balayés par la colère, la rationnalisation, et l'isolement affectif.

J'avoue enfin avoir beaucoup appris en vivant ou en séjournant à l'étranger. Je me suis rendue compte de l'imbrication de nos désirs les plus "profonds" et les plus amoraux avec nos valeurs culturelles, je me suis rendue compte aussi de l'incapacité de chaque être humain à garder une maîtrise minimale de lui-même, une individualité, une intégrité en dehors de nos cadres culturels, et qui dit cadres culturels dit valeurs. Ces moments furent ceux où la relativité des valeurs humaines m'est apparue avec le plus de force, confinant à un vertige, un vertige euphorisant, mais qui fait prendre conscience aussi de la nécessité de ces cadres, aussi relatifs et subjectifs soient-ils.

Je vous souhaite une bonne journée à tous.
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Noqa
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Enregistré le : mardi 11 septembre 2012 21:31

Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Noqa »

ce que vous racontez me touche ...

Je pense pas que j'ai été précoce mais j'ai eu un parcours scolaire un peu particulier, et depuis très petite j'ai toujours eu le sentiment d'être différente, à part. J'avais aussi une très grande maturité, peut-être trop de maturité, je m'entendais très bien avec les adultes et j'avais beaucoup de mal avec les enfants de mon âge ... et par effet d'inversement aujourd'hui à 24 ans j'ai l'impression d'être une petite fille, et j'ai toujours autant de problème à me sentir bien dans un groupe ... d'un côté je perçois beaucoup de choses chez les personnes que je croise, je peux être très observatrice, et j'ai comme un sixième sens, d'un autre j'ai vraiment du mal à avoir des relations sociales, je sais jamais comment je dois me comporter et je comprends pas les gens ...

Quand j'étais au CP je faisais les lettres à l'envers ... au fond je savais très bien comment les faire correctement, mais je trouvais ça plus intéressant ... en CE1 on m'a mise dans une classe "particulière" avec un peu tout le "rebus" ( selon le directeur de l'école) de ceux qui avaient mon âge ... je me souviens qu'au début j'adorais les maths, je trouvais ça très excitant de devoir trouver les résultats d'opération ... et puis je sais pas du tout à quel moment j'ai inconsciemment (je pense) décidé que je ne ferai plus de maths ... j'ai eu du coup un blocage, que je traîne encore aujourd'hui ... par facilité je dis que je suis dyscalculique, mais je sais pas si c'est vraiment ça, vu qu'à la base je l'étais pas ... j'ai mis de côté tout ce qui était matière scientifique ... par contre j'ai appris à lire très rapidement et j'ai toujours eu énormément d'imagination ... pour le brevet j'ai eu une des plus mauvaises notes du collège en maths, et la meilleure note en français ... à l'école primaire j'étais passionnée par les peuples d'Amérique et je rêvais d'être ethnologue, je ne dessinais que des choses qui tournaient autour de ça, j'avais des bouquins sur ça qui me fascinaient ... arrivée au collège je me suis pris une claque parce que dans ma classe "d'anormaux" du primaire on m'avait foutu la paix et j'étais loin d'être considérée comme une cancre comparée aux autres ... mais en sixième ça s'est gâté, et j'ai juste eu l'impression d'être bête au vu de mon incapacité à suivre le cours de maths, et je haïssais les autres et leur conformisme intellectuel ... et pour ne rien arranger à mes problèmes scolaires j'ai décidé que la grammaire c'était comme les maths, trop contraignant, rigide, et sans intérêt parce qu'il fallait apprendre par cœur ... du coup ça donnait des choses assez marrantes, parce que j'avais les meilleures notes en rédaction et les plus mauvaises en grammaire ... et je faisais même pas mes exercices de grammaire, j'arrivais pas à me forcer ... (ce qui est très étrange c'est qu'aujourd'hui après avoir appris plusieurs langues différentes je suis fascinée par les systèmes grammaticaux ... je ne comprends pas les gens qui se plaignent des déclinaisons d'une langue par exemple, je trouve ça tellement plus simple ! Et les nuances dans les conjugaisons me fascinent tout autant.)

j'ai toujours été anticonformiste mais là ça s'est gâté ... je me croyais supérieure aux autres en fait ... le pire a été la seconde, j'ai supplié ma mère de suivre les cours à la maison, j'en pouvais plus, j'étais la tête de turc de la classe et niveau scolaire c'était catastrophique, mais ma mère a pas cédé et m'a dit que c'était pas possible de rester à la maison ... à la même époque j'ai évoqué le besoin de me faire suivre par un psy, parce que je ressentais ma différence beaucoup trop, mais je crois que ma mère a pas pris conscience à quel point c'était important et donc j'ai pas été suivie .. j'avais un mépris sans limite envers mes camarades de classe, leur superficialité, leur puérilité, leur stupidité, et au final leurs moqueries me touchaient pas tant que ça, c'est plutôt le fait d'être obligée de subir ces gens que je méprisais qui me rendait malade ... en cours je m'ennuyais, et je m'endormais, même en histoire qui pourtant était une de mes matières préférées .. j'avais juste l'impression de rien apprendre, que ça servait à rien, et j'avais l'impression d'être en prison là ... et j'ai eu plusieurs profs cette année là qui m'ont détesté et qui ont tout fait pour que je redouble, en disant même que j'étais incapable de passer le bac, alors que jamais je n'ai fait aucun problème, j'étais bien trop maligne pour savoir que je devais pas m'amuser à répondre aux profs et que je devais laisser courir lorsqu'ils disaient des conneries ...
je suis partie à l'étranger pendant un an l'année d'après ... ça n'a fait que me convaincre de la vision que j'avais du monde ... j'ai changé de lycée à mon retour, et pour la première fois de ma vie je me suis mise à essayer de suivre les cours et à bosser un minimum, parce que j'avais qu'une idée, en finir le plus vite possible avec le lycée ... j'ai été mise sous ritaline par un neurologue parce que malgré tout je dormais en cours .. j'ai eu mon bac avec mention bien, sans pour autant avoir bossé comme une forcenée .. et l'année d'après je suis repartie à l'étranger pour faire du bénévolat, parce que je pouvais pas imaginer de me jeter de suite dans les études ... pourtant j'en rêvais de la fac depuis le collège, je me disais qu'à la fac ça serait tellement bien, que j'allais étudier que ce qui me plaisait ...
je suis rentrée à la fac après, et j'ai eu à nouveau ce gros problème de ne pas être capable de me forcer à étudier les choses que j'aime pas ... en lettres je me suis permise de ne pas lire plein de bouquins ... mais ayant une grande culture générale je m'en suis toujours bien sorti ... de lettres j'ai finalement fait une licence d'ethno, quelque part pour répondre à mon rêve d'enfance ... et là, après 4 ans passé à la fac j'ai juste eu une overdose de l'université, des étudiants ignares, des profs égoïstes et égocentriques, et ce petit microcosme de gens stupides qui croient être supérieurs parce qu'ils appartiennent aux "intellectuels" ...
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wilsonwilson
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par wilsonwilson »

Hello tout le monde,

J'ai eu ce problème aussi durant mon enfance, ma précocité à été détectée très tôt (3 ans) j'ai appris à lire et écrire tout seul et saut de 2 classes (MS et CP) car je m'ennuyais avec mon groupe d'élèves et je m'intéressait plus à ce qui se passait dans la classe d'à côté.
En ce qui concerne l'environnement familial j'ai eu des parents qui ont du très tôt cultiver cette 'superiorité' forcément ça créait des problèmes avec les autres et avec mon frère aîné qui devait penser qu'il était un peu arriéré par rapport à moi.

J'ai aussi eu deux personnalités en grandissant, celle de l'altruisme qui fait tout (et parfois n'importe quoi) pour se faire accepter dans le groupe, et celle du renfermé qui passe son temps à bouquiner et activités solo en tout genre.

Je crois que mes troubles psychiques ont été trop pris à la légère par mon environnement familial, du coup je suis devenu très vite agressif envers les autres, je supportais pas la critique verbale et ma différence, ça a mené à beaucoup de désillusions étant jeune. Moi même je me détachait un peu plus en me renfermant sur moi.

Je sais pas à quel âge s'est installée la dépression je m'en rends compte aujourd'hui car j'ai des symptômes physiques et moraux récurrents: fatigue, lenteur mentale, perte de lestime de soi, idées noires...

J'ai eu un parcours scolaire à la limite du chaotique (3 collèges, 3 lycées) des difficultés à m'intégrer partout où j'étais, trop à fleur de peau, à s'agacer pour un oui ou pour un non, toujours l'incompréhension de la famille, un sentiment de solitude qui se renforce au fil des années...

J'ai tendance à tout rationaliser aussi au lieu de vivre mes émotions, c'est un peu comme si je me sentais spectateur de ce qui m'arrive, j'ai pas vu de spécialiste pour mettre un nom sur mes troubles. Affaire à suivre lundi...

Le fait d'avoir des parents solitaires et qui plus est travaillent dans le libéral, ne m'a sans doute pas montré l'exemple d'ouverture vers les autres, j'ai du mal à leur faire confiance aussi d'autant que j'ai du gérer pas mal de leurs problèmes depuis leur divorce.

La précocité à tout de suite mis un mur entre moi et le monde, j'ai réussi à gérer un certain temps sans en parler ni y faire trop attention avec des personnes qui me connaissaient peu, en me cachant derrière un masque, je me prenais jamais au sérieux pour m'oublier un peu...
J'ai toujours un peu eu la haine des autres en repensant à mon histoire, j'essaye de transformer ça en quelque chose de positif mais quotidiennement c'est fatiguant.
Rien que d'écrire ou d'essayer de parler, j'ai les idées qui fusent et je sais plus trop quoi dire ou ne pas dire.

J'en arrive a plus savoir ce que je vaux, mon besoin d'oublier mon enfance difficile et d'être un peu plus dans la norme y sont pour quelque chose. J'ai pas toujours fait les bonnes rencontres et je me laisse un peu trop influencer par certaines personnes. Pourtant je me montre fort et résistant mais les nombreuses fois où j'ai envie de pleurer, les larmes ne sortent pas...
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Zooey
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Zooey »

Bonjour Wilsonwilson,

D'abord merci pour ton témoignage. De nos jours, il y a tellement de blabla sur la précocité, mais toujours du point de vue des psychologues fana du QI et des parents, et puis ça fait de l'audience faut croire. Du coup je trouve ça vraiment bien d'avoir le témoignage d'un jeune homme qui a eu ce diagnostique (si on peut appeler ça diagnostique vu que c'est pas une maladie...) étant petit, ça permet d'avoir du recul sur ce que cela peut provoquer dans un parcours que de porter cette étiquette depuis l'enfance.

Du coup je me pose une question, c'est par rapport à une de mes nièces, est-ce que tu penses qu'il aurait mieux valu qu'on ne te parle pas de précocité quand tu étais petit, qu'on ne te fasse pas sauter de classe? Ou est-ce que tu penses que c'est, comment dire, l'investissement narcissique de ta personne par tes parents qui a été plus lourd à porter? Enfin disons, si toi tu étais face à un enfant montrant des signes de précocité, qu'est-ce que tu ferais différemment?
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wilsonwilson
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par wilsonwilson »

Zooey pour te répondre, je pense aussi que les adultes devraient arrêter de fantasmer sur les résultats d'un test de QI et les "portes" que ça ouvre. Surtout à un si bas âge, ça ne peut pas refléter toute une personnalité ni conditionner un enfant à vie. je pense qu'un enfant à d'autres besoins et d'autres priorités à cet âge que de se préoccuper de sa future vie d'adulte...

Une question, est ce que ta nièce présente des traits de personne hypersensible, car on m'a dit que c'était souvent le cas chez ce type de personne, si oui, ce que je ferais c'est lui faire prendre conscience que sa perception différente des choses n'est pas un défaut, sans mettre une étiquette de "précocité" simplement une personne unique, qui a le droit de se poser plein de questions, ses parents sont la pour la rassurer et surtout lui apporter de la nourriture émotionnelle pour qu'elle se sente confiante. Ça doit être quand même demander pas mal d'efforts aux parents je pense... d'autant que dans mon cas personnel, j'arrivais vite à pousser mes vieux dans leurs retranchements (questions indiscrètes et mal placées... )

personnellement j'essayerai de mettre le plus possible en avant d'autres qualités que ces enfants précoces peuvent avoir, souvent une perception sensorielle hors normes qui pourrait être utile dans les domaines artistiques (danse, musique, art) et surtout ou ces qualités s'expriment à travers un groupe, car la sensation de différence peut amener très vite au repli sur soi. La quête de reconnaissance et de lien social peut être très dure, autant poser les bonnes bases rapidement.
Beaucoup d'écoute, de patience, et d'ouverture d'esprit sont je pense nécessaires car apprendre vite veut aussi dire vite assimiler ce que les autres attendent de soi, en cas d'intellectualisation ça peut vite mener à la phobie scolaire, moi j'y allais à reculons à une époque, j'étais devenu un souffre douleur.

Je pense que c'est une chance que de pouvoir réussir à l'école sans trop se forcer, ça met une pression en moins maintenant moi je ne.montrerais pas à tout prix que mon fils/ma fille est "meilleur(e)" que les autres en faisant sauter des classes et en cultivant la performance. D'autant qu'il ne doit pas y avoir beaucoup de psys qui sont informés sur le cas de ces enfants, je sais pas...

Après si vraiment ça va pas à l'école parce qu'elle décroche par ennui, je conseillerai de peser le pour et le contre et s'assurer que ça ne se fera pas au prix de son intégration dans le groupe. Surtout que la jalousie peut vite déstabiliser une personne sensible. Mon frère m'a fait subir, il devait se sentir naze comparé au petit génie qu'on faisait de moi. Ça a bouffé notre relation des le début, aujourd'hui on est assez distants.

"il faut que tu fasses un bac scientifique" mes parents me disaient... Oui sauf qu'à l'époque j'avais d'autres intérêts, d'autres envies et surtout pas de faire de longues études malgré mon potentiel. Il y aura toujours conflits entre parents et enfants sur ce point, dans le cas où la scolarité se passe de manière assez singulière je pense que ne pas mettre trop d'attentes sur le dos de son enfant est important.

Voilà en espérant avoir répondu à tes questions, sans faire trop (trop) long, je sais j'ai du mal à m'arrêter

Ah oui le plus difficile peut être ce n'est de pas tomber dans l'admiration de cet enfant. Ça risque de le faire grandir avec une pression, qui, comme c'est mon cas, se transforme en anxiété et un besoin de toujours faire mieux pour se sentir admiré...

Sur ce, bonne soirée
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wilsonwilson
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par wilsonwilson »

Pour un point de vue plus complet du sujet je t'invite à consulter le site Talentdifferent.com

Explications tant au niveau psychologique, sociologique et neurologique le cas de ces enfants surdoués, HP, qui ont un mode de fonctionnement différent mais un esprit d'ouverture immense, des intérêts et goûts divers et variés, le tout est de trouver un équilibre à apporter à ces enfants.

Comme moi j'ai l'impression de marcher constamment sur un fil, et qu'un tout petit pas de travers peut tout détruire...
Ayla
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Enregistré le : samedi 17 mai 2014 20:21

Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Ayla »

Bonjour à tous,

Je viens de tomber sur la discussion, ayant vécu des choses similaires à vous tous.

Je suis en thérapie intensive ces derniers 9 mois (trois mois à plein temps dans un centre pour alcooliques, et ensuite suivi psy 2 fois par semaine, recherches sur le net quotidiennes) ; bref, j'ai décidé de m'occuper de moi sérieusement après avoir touché le fond.

En tout cas, je me sens beaucoup mieux maintenant et j'aimerais partager ce qui a "marché" pour moi, si ça peux aider certains d'entre vous!?

L'essentiel se résume à accepter notre nature, assumer d'être différents et de trouver L'environnement / la vie qui nous convient ; arrêter d'essayer d'être dans la norme. Profiter des avantages et gérer les inconvénients. Apprendre à être bien avec la solitude ou rechercher le contact avec nos "pairs"

Quelques sites / blogs que je recommande pour renforcer la confiance en soi et oser être soi même, apprivoiser ses émotions, comprendre la douance :
- talents differents.com ?
- Redpsy.com
- Zen habit / Habitudes Zen (Le lâcher prise)

Et puis compenser/ se faire plaisir en nourrissant son cerveau autant qu'il en veut (j'apprends pleins de trucs différents tout le temps) ; se détendre avec des loisirs créatifs.

Voilà ^^ ; bon courage à vous tous :)

--edit--

Ah! J'allais oublier :

Lire et bien intégrer la "Prière de la Sérénité".
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Zooey
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Précocité, différence dans l'enfance et dépression

Message par Zooey »

Bonjour,

Une émission sur la mesure de l'intelligence telle qu'elle se fait actuellement (tests de QI). Une neuropsychologue tire la sonnette d'alarme en rappelant qu'il n'y a pas une mais des intelligences et que mesurer chez tous l'intelligence de la même façon fait porter des "diagnostiques" erronés.

Sur RFI, émission "Autour de la question" de Caroline Lachowsky du 20 novembre 2014, avec la neuropsychologue Sylvie Chokron :
Peut-on mesurer l'intelligence?
Peut-on mesurer l’intelligence ? Les tests de QI sont-ils vraiment adaptés à chacun ? Le QI correspond-il d’ailleurs à l’intelligence ? Si tant est que l’on puisse parler d’un type unique d’intelligence… (4ème de couverture de l'ouvrage Peut-on mesurer l'Intelligence paru au Pommier).
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