Sur le fil de ma destruction. Quand la nuit était mon refuge.

Répondre
Breathefly
Messages : 1
Enregistré le : lundi 06 octobre 2014 18:59

Sur le fil de ma destruction. Quand la nuit était mon refuge.

Message par Breathefly »

Salut à tous, je suis nouvelle sur ce forum ( au fond de moi j'aurais probablement aimé ne jamais en avoir besoin, soyons franc) Je souhaite vous faire partager des écrits que j'ai rédigé quand la nuit était mon sombre refuge et mon stylo, mon seul ami compréhensif. Cela traite de certaines parties difficiles de ma vie, mélangées pour ne faire qu'un amat de mots.

Sur le fil de ma destruction

J’étais destinée, ou du moins je l’aurais cru à une certaine époque, à une belle vie, à de beaux moments, à d’incroyables vérités. Je voyais les choses en grand, avec toujours cette volonté de fer, cette volonté de faire ce que les autres n’entreprennent pas, parce qu’ils se sentent si fragiles, si faibles face à la grandeur de la vie.
Je ne me suis jamais sentie faible. A aucun moment de ma vie. Les moments de faiblesse n’ont été que l’expression de mes sentiments assemblés à des comportements humains, tels que la crispation des fibres nerveuses lorsque l’on s’énerve, lorsque l’on se fatigue, lorsque l’on veut tout arrêter. Les moments de faiblesse n’ont été que des larmes de souffrance, mais comme je l’ai toujours pensé, en prônant la théorie du bonheur par la souffrance, sans souffrance, le bonheur n’aurait jamais été si exquis, si délicieux, si plein de grâce, si vivant. C’est en connaissant des moments tristes, des moments tragiques, des moments insupportables que l’on apprend véritablement à apprécier le bonheur et les moments de joie, les moments de rires heureux, les moments de regards sincères, à leur juste valeur. C’est pour cette raison, cette théorie du bonheur, que jamais je ne me suis sentie faible.

Une autre que moi vous raconterait mon histoire en des termes tristes, dévalorisants, et cracherait à la figure de la vie en lui disant qu’elle n’est plus qu’une M..... Elle vous raconterait que mourir n’est pas une fin en soi, mais le commencement de l’absolu, de l’infini, de l’éternelle satisfaction d’être réduit à l’état d’atome, sans sentiment, sans volonté aucune, sans goût ni odeur. Elle vous raconterait combien la vie sur terre est inutile, sans valeur, sans finition, sans finesse. Un brouillon d’âmes perdues, un échantillon d’esprits égarés dans le fin fond de la connerie humaine. Elle vous raconterait, pour finir, qu’il n’y est au monde rien de mieux que la sensation de liberté que procure l’arrêt des battements de vos cœurs, qu’il n’y est rien de mieux qu’un cerveau à jamais endormi et des neurones en disfonctionnement qui cessent de s’électrocuter pour appeler à l’aide. Qu’il n’y est rien de mieux que le silence infini. Mais assurément, cette personne ne connaît pas ma théorie du bonheur, et c’est pourquoi c’est moi et moi seule qui vous raconterait mon histoire.

Où est papi, maman ? C’est quoi le ciel ? Pourquoi ne peut-on pas y aller quand on veut, et revenir ici quand on veut ? Il fallait comprendre désormais que le monde a ses limites. On ne bouge jamais d’ici : si l’on s’envole, on rejoint l’univers qui nous tue, si l’on creuse, on rejoint le noyau qui nous tue. Comprendre que l’homme est un être vivant qui ne peut s’échapper que par la mort.
Papi nous a abandonnés, maman ? Il revient quand ? Dis-lui, s’il te plaît, que je l’aime. Il me manque… Il fallait aussi comprendre qu’on ne revient jamais de la mort, que la mort est un arrêt brutal à un semblant d’existence. Comprendre qu’une fois dépassées les limites, le monde ne nous est plus accessible. Finalement, comprendre que ça n’était pas de la faute de papi si papi ne revenait pas.

Après avoir compris tous ces aspects de la vie, j’ai bâti ma propre philosophie de vie. Deux choix s’exposaient à moi : ne plus rien aimer, ne plus aimer les belles choses, sous prétexte qu’elles ne sont que par trop éphémères, et qu’elles finiront par disparaître et nous faire de la peine, tout en attendant que la mort inconnue vienne nous chercher, ou alors, apprécier ces belles choses à leur juste valeur et le temps qu’elles dureraient, profiter d’elles et leur montrer qu’on les aime pour qu’elles vivent une existence des plus heureuses, simplement au cas où la mort offrirait une existence des plus tristes. Mon naturel caractère et l’amour de petite fille qui alors emplissaient mon âme ont aussitôt décidé de vivre une existence des plus belles, au risque de périr en regrettant que le temps ait passé si vite, en regrettant que tout s’achève un jour, mais en espérant, toutefois, que la mort soit aussi belle que la vie l’eût été.
Pourtant, en grandissant, j’ai connu d’autres peines que la perte de cet être cher. J’ai compris un nouvel aspect de la vie : il y aurait toujours de la tristesse tant qu’il y aurait du cœur, tant qu’il y aurait des sentiments, tant qu’il y aurait de l’amour. Et j’avais fait le choix de mettre tout mon cœur en mon existence, alors je faisais le choix d’accepter la tristesse.

Et puis j’ai encore grandi. J’ai toujours gardé cette philosophie, mais les larmes coulèrent beaucoup moins avec le temps. Lassée d’être considérée comme une personne étrange, anormale, sous prétexte que j’avais des sentiments, et envie d’être heureuse, et envie de voir le monde heureux, mes yeux ont cessé de s’humidifier. Et puis j’ai encore grandi et j’ai fini par mettre des mots sur cette théorie. Je l’ai baptisée « la théorie du bonheur par la souffrance », par opposition au choix que je n’ai pas fait, celui qui offre « la théorie de la mort comme étant la solution à la vie ». Les moments tristes m’apprenaient à aimer les moments heureux. Les moments tristes me donnaient des solutions pour éviter les moments malheureux. Et les moments malheureux, car il y en a eu, vécus dans toute leur splendeur, une fois passés, m’ont appris à reconnaître la valeur des choses simples. Mieux encore, ils m’ont appris à donner par moi-même de la valeur à des choses simples.

Mais pourquoi s’adresse-t-elle toujours au passé ? Question très pertinente. La réponse est assez effrayante : je suis morte. Je suis morte en appliquant ma théorie du bonheur. Je suis morte en essayant de l’aider, de l’aider à oublier cette fâcheuse théorie du malheur, cette théorie opposée à la mienne, qui prône la mort en tant que solution à la vie. Il avait fait le choix de se détruire à petits feux. Ou devrais-je dire, sa fragilité, sa sensibilité, sa grandeur d’âme, et la vue d’un monde qui ne cesse de mourir avec le temps, ont fait ce choix à sa place.
J’ai dépassé les limites de ce monde et rejoint le ciel, en essayant par tous les moyens de sauver une fois de plus un être vivant. Et malgré toute ma patience, cette fois-ci, j’ai échoué. Mais aujourd’hui encore, à l’heure où je vous écris ces mots d’un néant paisible qu’offre la mort, je puis vous assurer que la vie fut la plus belle de toutes mes expériences.

A tes beaux yeux, à ton innocence, à ton absence de volonté, à ta déchéance, à ton caractère, à ton amour. A toi. Je pardonne tout. Je me pardonne même moi de ne pas t’avoir sauvé, car l’on m’a dit récemment – et j’ai fini par l’accepter – que le seul à pouvoir sauver quelqu’un, c’est ce quelqu’un lui-même.
Tobby4
Messages : 4
Enregistré le : mardi 20 novembre 2018 20:53

Sur le fil de ma destruction

Message par Tobby4 »

Magnifique texte, merci pour ton partage
Répondre