Petit avant-propos:
J'ai longtemps réfléchi avant d'apporter un témoignage qui risque de jeter opprobre sur les psychiatres. Attention, ce que je vais raconter ne vise pas à discréditer la psychiatrie ou les praticiens. Je tiens simplement à m'exprimer à propos une "expérience"personnelle assez lamentable. Peut-être qu'elle résonnera pour certains d'entre vous. En aucun cas, ce récit est un pamphlet contre la psychanalyse. Pour ceux qui ont trouvé un bon psy, ainsi qu'un traitement approprié, ne lâchez pas vos efforts.

Les débuts chaotiques au sein de l'Education Nationale: (c'est bien connu tous les enseignants sont des dépressifs...)
Mais d'abord, un petit rappel des faits. Qu'est-ce qui m'a conduit à consulter? C'était il y a sept ans environ. J'étais à l'époque stagiaire pour devenir professeur d'anglais. Après des longues études, la réussite au CAPES du premier coup, j'ai sans doute fait l'erreur de ne pas avoir pris une année sabbatique avant d'entamer cette année de titularisation à l'IUFM et enchaîner les stages dans des collèges difficiles. Je me rappelle qu'après la réussite à l'exam, j'ai fait un burn-out pendant l'été 2007. Mais celui-ci n'a pas été officiellement diagnostiqué. Le médecin que j'avais consulté sur le lieu de vacances avait conclu à une fatigue passagère due à une décompression nerveuse, après toute la tension accumulée durant l'année de l'examen. Il m'avait simplement donné des gélules de vitamines, qui n'ont pas eu un effet très probant. Je dormais toute mes journées, paralysée dans mon lit, incapable de faire une petite ballade sur la plage, etc... Je suis donc fait mon entrée dans l'Education Nationale dans un état physique fragile, sans parler de la peur, somme toute humaine, d'être plongée dans un nouvel univers qui m'est vite apparu impitoyable. Je n'étais pas préparé psychologiquement à ce "choc", à cette transition entre le cocon que m'avait offert mes années à la fac et ce plongeon brutal dans des classes d'adolescents surexcités, qui ne cessaient de me tester de façon perverse. J'étais très (trop?) jeune, à peine 23 ans... J'avais beau faire preuve d'une autorité de fer qui s'affirmait de plus en plus à leur contact, rien à faire. Je trébuchais dans les "pièges" qu'ils me tendaient pour me faire craquer, au sens propre comme au sens figuré. Je n'ai eu aucun soutien de la part des responsables de l'IUFM, qui passaient leur temps à nous rabaisser et à nous formater. Et pour couronner le tout, l'ambiance au sein de ce collège, collège que je n'avais d'ailleurs pas choisi, était épouvantable. Aucune aide, aucune écoute de la part de l'équipe pédagogique. Pire, des tensions ont commencé dès le départ avec le principal de ce collège, qui, en raison d'un malentendu autour d'un projet pédagogique que nous avait imposé de faire l'IUFM, m'avait pris en grippe toute l'année. Ma maître de stage n'était pas d'un grand secours non plus. Un soir, pendant près d'une heur et demie, elle m'avait quasiment séquestrée dans sa classe pour me faire une leçon de morale: elle prétendait en avoir assez d'entendre parler de mes problèmes, avait menacé de me lâcher et de lancer un avertissement auprès de l'IUFM... Avait-elle été briefée par ce principal pour exercer une pression supplémentaire pour me réduire au silence et ainsi mieux me manipuler?
En résumé, j'ai vite craqué psychologiquement. A ma fatigue physique s'ajoutait ce harcèlement moral. Et les premiers symptômes classiques de la dépression ont fait leur apparition: fatigue immense dès le matin; je devais me traîner le matin pour me lever, je n'avais pas encore de voiture pour me rendre à ce bahut qui était éloigné de chez moi, je devais transporter tout mon matériel toute la journée car on ne m'avait pas attribuée de salle fixe . Je souffre d'une scoliose en plus, alors je devais faire appel à mes dernières ressources pour transporter cartable, livres, poste audio, petite gamelle, etc.. Mon dos me faisait souffrir, mais je me taisais. Les élèves et leurs parents me faisaient souffrir, mais je me suis tue pour ne plus faire de vague. En effet, j'ai vite compris grâce à ce baptême du feu que seul le silence était la seule option pour se faire titulariser et se faire "bien voir" auprès des autres... "Never explain, never complain". J'ai vite intégré les principes d'un système s’apparentant à un régime totalitaire.
Bref, l'année s'est révélée cauchemardesque... Je perdais l'appétit. Il faut dire qu'on n'avait à peine 30 minutes le midi pour "manger". Il n'y avait pas de frigo, ni de micro-onde, alors je mangeais avec dégoût un sandwich tout ratiné et plus frais qui avait passé sa matinée dans le casier... Je n'avais plus de goût à rien, seul comptait mon boulot. Les mois étaient rythmés par diverses inspections. La pression se faisait de plus en plus forte, le boulot aussi, les préparations de cours, les projets obligatoires à réaliser, etc... Je dormais mal, et j'avais pour la première fois de ma vie des idées noires. Intérieurement, je voulais démissionner. Mais mes proches, ainsi que l'IUFM me pressait de continuer pour être titularisée. Comme le disaient ces formateurs, qui m'ont bien déformée d'ailleurs, on devait "essuyer les plâtres" d'une année difficile pour tous. Je n'étais pas la seule à sombrer dans la dépression. Dans mon petit cercle, je voyais des visages s'assombrir de plus en plus, nos traits marquaient l'épuisement. On avait perdu tout espoir de s'épanouir dans ce métier.
Le début d'une pseudo prise en charge médicale
J'ai commencé à consulter un psy pour m'assurer si oui ou non je souffrais d'une dépression. Tout m'était pénible, je broyais sans cesse du noir, je pleurais matin et soir, je ne pouvais plus arrêter ces larmes. Qui plus est, pour pimenter cette "anus horribilis" (année horrible), j'ai été confrontée à des problèmes familiaux. Mon père a déclaré une cirrhose qui a failli le mener à la tombe. On m'avait cachée qu'il buvait depuis la mort de sa mère.
Il nous menait, à ma mère et moi une vie infernale. Quand il avait trop bu, il s'emportait pour un rien, nous beuglait dessus... Je ne le reconnaissais plus. Il s'en fichait pas mal de mes soucis. Il était bien plus préoccupé à s'approvisionner en bouteilles de rosé, et flasques d'alcool... Ma mère n'en pouvait plus, elle parlait de divorce. Il ne manquait plus que ça! J’assistais impuissante à la déliquescence de ma famille; ainsi qu'à ma ma propre déliquescence... Jusqu'à un soir de décembre, peu avant Noël, mon père avait fait une hémorragie du foie. Comme on voulait me "protéger", on m'avait dit qu'il avait dû être transporté d'urgence à l'hôpital pour une gastro. Ce n'est que quelques mois après, en jetant un coup d'oeil sur les rapports des médecins et ses analyses de sang que j'ai compris. J'étais blême de rage, de colère à son encontre mais aussi envers ma mère qui m'avait tout cachée. Je n'en pouvais plus, je voulais mourir. Tout se disloquait autour de moi.
Même si mon père est redevenu sobre et que les choses reprenaient un cours normal dans la vie de couple de mes parents; ma mère ayant pardonné les "écarts" de mon père, c'était mon état qui les préoccupait. C'est sur les conseils d'une cousine, même pas de mon médecin traitant, que j'ai consulté un psy qu'elle m'avait recommandée. Il l'avait aidée...
Le premier contact s'était plutôt bien passé. Il avait posé le diagnostic d'une dépression "unilatérale" sévère (pas "bilatérale" comme dans le cas d'une bipolarité). Tout de suite il m'a prescrit des AD, des anxiolytiques et somnifères. Bref, le cocktail classique... Mais voilà, il s'est avéré au fil des années que je ne tolérais pas les AD! Autant je supportais bien les autres psychotropes, les AD ont été une catastrophe. Le premier, dont je ne me rappelle plus le nom, m'avait déclenché des crises sérotoninergiques, l'un des effets secondaires les plus graves des AD. J'avais comme des convulsions, je ne tenais plus en place, et j'avais un comportement disons inhabituel: j'étais prise d'ccès de délire de ... danses, de chants... Je dansais sur... du Claude François que je fredonnais, alors que je n'écoutais jamais du Cloclo! ça peut faire sourire, mais je ne me contrôlais plus. J'étais hilare. Puis, après la crise de "délire" passée, j'avais des maux de ventres, des maux de têtes, etc... J'ai alors lu la notice et j'ai compris qu'il fallait absolument arrêter ce traitement, sinon c'était le coma.
C'est alors que s'est engagé la début des conflits, des incompréhensions entre mon psy et moi....
Première TS ou la spirale infernale
Après l'échec de ce premier traitement, le psy s'est empressé de m'en donner un autre. Nouvel échec. Et puis encore un autre, le fameux "Fluoxétine". Je l'ai quand même pris pendant plus de 3 ans. Mais bizarrement, je n'allais pas mieux. Bien au contraire!
Certes, entre temps, j'ai été titularisée puis a commencé une nouvelle source de stress: les mutations! C'est ainsi dans la Fonction Public. On vous fait croire que vous avez le choix pour vos mutations quand vous saisissez des "voeux". Mais étant jeune, célibataire, non pacsée, vous êtes sûr que vos vœux ne seront guère exaucés. Des voeux pieux... C'est ainsi que je me suis retrouvée dans des régions parisiennes "chaudes". J'ai dû subir des lynchages psychologiques de la part des hiérarchies qui m'estimaient incompétentes, pas faite pour ce métier! . S'en sont suivis des arrêts maladies successifs et quelques TS. J'ai dû attendre 2 ans pour regagner ma région. (chez les Ch'tis!

Ce jour-là, j'ai failli être internée en HP. Ils m'ont gardé 24h en observation. La police avait alerté mes parents qui se sont dépêchés de venir sur place. Ils ont fait près de 2h de route pour signer une décharge afin qu'on ne m'interne pas. J'ai quitté les lieux, la Côte et suis revenue chez moi.
Je devais revoir mon psy de toute urgence...