Face à l'incompréhension des gens, comment réagissez-vous ?

[tite-gabberine]

Voilà, je suis tombée sur le blog d'une personne qui a fait un article sur les suicides. Ca m'a tellement remuée, sa façon de juger et de traiter les gens de lâches et de faibles d'esprit que j'ai été obligée d'y réagir et de lui répondre. Vraiment, je me sens agressée, surtout que dans mon entourage, une bonne partie des gens que je cotoye pensent comme lui.

Je lui ai peut-être écrit une sacrée tartine qu'il ne lira probablement pas et qu'il ne publiera sûrement pas non plus, mais ça m'a semblé important de le faire.

Vous auriez fait quoi à ma place ?


Pour les intéressés voilà ce que je lui ai écrit :

je sais que le suicide est un acte vraiment très difficile à comprendre
pour faire simple, je dirais simplement que le suicide est la lueur d'espoir de ceux qui n'ont plus d'espoir. C'est un acte considéré comme lâche par certains, qui demande cependant une forte dose de courage, car qui sait ce qu'il y a après la mort ? qui n'a jamais eu peur de la mort ? (surtout quand tu es sur le point de mettre fin à tes jours, tu as toujours un moment de remise en question à cause de la peur)

Je pensais comme toi, il y a à peine 2 ans et demi en arrière. Il y a deux ans et demi en arrière, ma vie allait bien, pas à me plaindre (même si tout n'avait pas toujours été tout rose), j'étais pleine d'énergie et de projets et jamais je n'aurais imaginé que j'essaierai de foutre ma vie en l'air parce que je me sentais forte. Et pourtant c'est ce que j'ai fait.

Quand tu perds les gens qui te sont chers, quand tu te fais trahir et manipuler non pas par une mais par plusieurs personnes, quand ton boulot te fout une pression d'enfer et que tu te retrouves comme un rat pris au piège et sans avenir, c'est rien. Le pire, c'est la suite.

D'abord, Il y a cette sensation bizzard de fatigue. Tu es tout le temps fatigué, tu ne sais pas pourquoi, tu ne sais pas d'où elle vient. Puis, vient l'insomnie. Tu as beau être complètement crevé en permanence; rien n'y fait tu n'arrive pas à dormir et vers les 4 heures de matin, tu te réveilles et impossible de te rendormir.

Puis viennent les douleurs musculaires, les migraines, la nuque raide, ton appétit qui change et toujours cette fatigue et ces nuits horribles, par-dessus tous tes problèmes existentiels. Tu n'as plus de libido, tes passions se transforment en corvées, tes amis te gonflent et toujours et encore cette fatigue ! Et le stress qui n'en finit plus…d'ailleurs tout ça, ça te provoque des pertes de mémoire et une grosse baisse de concentration, et tu n'y peux rien là non plus. Tu ne sais pas pourquoi ni comment tu es dans cet état.

Et le pire, c'est que tu ne te sens pas forcément triste ou déprimé mais vide, et que tu ne passes pas tes journées à ruminer tous tes problèmes. Au contraire, tu relativises et tu gardes la tête haute…jusqu'à ce que la fatigue soit plus forte que toi. A ce moment là tu à l'impression d'être une m*, que tu es inutile et complètement nul et que tout ce qui t'arrives de mal tu le mérites.

Tu perds complètement le contrôle sur ta vie. Ca peut commencer par ton alimentation, puis après c'est ce que tu fais que tu ne contrôles plus. Forte perte de motivation, juste envie de rester tranquille chez toi. En plus tu te sens tellement crevé que tu ne veux rien faire d'autre

Au moindre problème, tu deviens agressif. Avec tout le monde. Tu as les nerfs à fleur de peau. Tout ce qui t'arrive de plus ou moins stressant te prend la tête facilement. Cet état dans lequel tu es, tu n'en vois plus le bout. Tu es déjà allé voir ton généraliste qui t'a dit que ce n'était sûrement rien qu'une mauvaise période à cause du stress, il t'a prescrit du valium mais rien n'y fait, rien ne change, ça ne va pas du tout. Ce n'est pas possible que tu restes dans cet état tout le temps.

Et puis, le peu de temps que tu arrives à dormir, c'est pour cauchemarder. Cauchemar classique qui ne veut rien dire, ou cauchemar sur les choses qui t'on chagriné. Donc le peu que tu dors, tu le dors mal. Cette situation ne peut plus durer et il semble que rien n'y fait.

Puis, ton comportement agressif et les boulettes que tu as faites à cause de ton manque de concentration au travail font que tu es licencié, tu te retrouves au chômage, et tes soucis de santé ne se sont pas améliorés. Ce n'est pas la faute de ton employeur, les boulettes c'est toi et toi seul qui les a accumulées au fil du temps et tu le reconnais.

Et tu n'oses plus regarder ta face dans le miroir...à défaut de te sentir déprimé ou triste, tu ressens un vide immense. Tu n'as plus d'émotions, plus de sentiments. Tout semble te passer dessus comme de l'eau sur l'aile d'un canard. Et tu as réussi à faire le vide autour de toi, rares sont les amis qui sont restés, s'il en reste encore.

Tu te rends bien compte que quelque chose ne va pas.

Aller voir un psy ? Tu n'es pas fou voyons ! Et que diraient les gens s'ils savaient ? Ils te prendraient pour un assisté, un faible d'esprit, un débile mental et qui voudrait de la compagnie d'une telle personne ? Alors tu retournes voir ton généraliste, qui ne te trouves rien et qui en déduit que ces maux sont d'origine psychiques. Tu n'y crois pas, ça ne peux pas être possible. Toi, un faible d'espirt ? Jamais ! Tu peux parfaitement t'en sortir tout seul !

Tu essaies donc de t'en sortir seul, en ne laissant pas voir ta faiblesse à personne, my god la honte si les gens savaient ! Et finalement, tu n'en peux tellement plus, tu te sens inutile, faible, sous-homme, débile et tellement mal dans ta peau et dans ce corps infernal que tu réfléchis à une fin à tout ça. La médecine semble ne rien pouvoir y faire et pourtant tu essaies encore de te persuader que ce que tu as, ce n'est pas psychique !

Alors qu'est-ce que tu fais ? Si la médecine ne peux pas soulager tes maux et qu'en plus tu te sens complètement vide d'émotion, que rien ne va, que tu sais très bien que si tu te sors du chômage en te trouvant une place tout recommencera comme avant parce que tu n'as pas sû te gérer...il faudra bien une porte de sortie non ? Tu penses de plus en plus au suicide, mais sans que ce soit sérieux.

Et un jour tu regardes vraiment autour de toi et tu te rends comptes qu'en plus des problèmes que tu avais avant d'être dans cet état, tu as fait le vide autour de toi, tu as perdu ton emploi et en plus tu ne vaux rien parce que tu n'es qu'un faible d'esprit. Et là tu décides de mettre fin à ton cauchemar, quel que soit la porte de sortie. Surtout quand ça fait 2 ans que ça dure et que tu as l'impression que rien ne s'améliorera vu que ça dure encore et encore et encore.

Au moment où tu as prévu de te tuer, tu as vachement peur et tu mets un sacré moment à te décider. Mais si tu passes à l'acte, ce n'est pas simplement pour fuir la vie lâchement, mais plutôt pour en être le maître.

Tu sais, j'ai un ami qui s'est suicidé et qui se sentait comme ça, à sa mort on a découvert que son état venait d'un problème de la glande thyroïde. Personne n'en avait rien vu et il n'était donc pas soigné. Complètement dépressif, il s'est pendu. Il en pouvait plus

Moi j'ai essayé de me suicider suite au témoignage fait plus haut. C'est ce que j'ai vécu. Je ne vois pas en quoi continuer de vivre dans cette situation aurait été courageux, alors que je n'avais plus personne avec qui partager ma vie, plus rien à quoi m'accrocher et rien à prouver.

Maintenant ? Je suis toujours dans la même situation, je me sens toujours aussi vide, mes nuits sont toujours aussi pénibles, j'ai toujours autant de douleurs musculaires, migraines etc, mais je suis suivie par un psy, en fait on ne m'en a pas vraiment laissé le choix.

"Non les suicidés ne sont pas les habitants de la Suisse.", ben si.
Désolée pour la tartine que je t'ai écrite et bravo si tu es arrivé au bout. Je te souhaite de ne jamais passer par une envie de te foutre en l'air.

[Luuna]

Bonjour tite-gabberine,

Je comprends ce que tu as ressenti en lisant cet article, j'en ai lu plusieurs qui évoquaient le même point de vue et ma première réaction a été la colère pour ce manque de respect envers ceux qui ont souffert et qui sont partis. Je ne comprenais pas qu'on puisse cracher sur leur mémoire de la sorte

En fait je pense que c'est une opinion née non pas du mépris ou de la malveillance mais de l'ignorance. Il est naturel, rationnel pour l'homme de vouloir vivre, les raisons de pouvoir penser le contraire échappent à cette logique, c'est normal que ce soit déroutant.
Plusieurs de mes proches non plus ne comprennent pas cette idée et ont parfois des discours un peu durs vis à vis de cela et intérieurement ça me fait sourire, car sans être synonyme de bonheur parfait cela me rassure sur leur état moral ^^

Je crois que ta réaction devrait amener l'auteur à réfléchir, j'aime particulièrement ta conclusion :

Je te souhaite de ne jamais passer par une envie de te foutre en l'air.

[nunu]

tite-gabberine je trouve que tu as fait une merveilleuse réponse, exactement ce qu'il fallait

comme je l'avais déjà dit, je trouve que notre pays la dépression, le suicide reste tabou, et c'est plus facile de critiquer que d'aider !!

moi je parle quasiment pas de ma dépression, seules 3/4 personnes c'est tout, mais je dirais que ce qui m'énerve le plus, c'est les gens qui fanfaronne en disant qu'ils ont fait une dépression, alors que c'était juste un coup de blues. Et là je connais une personne qui est en arrêt de travail pour dépression, alors que c'est juste un prétexte, je trouve ça lâche

[Alia]

Bravo pour ta réponse ! J'espère qu'il changera d'opinion après cela !

Au début je n'en parlais pas par peur qu'on me juge et me délaisse.
Mais bon, j'étais plus assez marrante alors on m'a quand même lâché ... donc maintenant je le dis et je pense même que ça m'aide.
Le dire, c'est le reconnaître et avancer.

Et puis ... il y a des jours où je préfère sourire pour ne pas qu'on m'interroge. Car s'en suivrait un débat sans fin dans lequel je perdrais mes forces restantes.

J'ai l'impression que quand quelqu'un ne l'a pas vécu, il ne comprend pas.
Et c'est pénible.
Aux yeux de beaucoup j'apparais comme une "sécheuse", une comédienne ... le dépression ne serait qu'un prétexte. Je trouve ça injuste...
Qui aimerait ressentir ce vide ?

Encore bravo pour ta réponse, et espérons qu'un jour les pensées sur la dépression changeront !

[tite-gabberine]

malheureusement, le seul moyen de faire comprendre aux gens ce que nous vivons, c'est de nous expliquer clairement ce qui n'est vraiment, vraiment pas facile à visage découvert.

C'est vraiment très très dur de parler de sa dépression. C'est peut-être un peu pour ça que j'ai pris mon courage à deux mains pour lui écrire ce message.

Tant qu'on ne leur explique pas, les gens ne comprennent pas (et heureusement pour eux quelque part, ça veut dire que leur moral va bien ).

[titom]

Face à l'incompréhension des autres?
je ne leur en veux pas, je n'en veux à personne!
j'ai moi meme jeter des pierres avant de me retrouver dans cette situation!
et c'est compliqué: difficil d'etre dans cet etat mais difficil aussi de se retrouver 'en face'!
J'aime bcp la réponse de luuna.
C'est juste de l'ignorance et à pres tout si les autres se sentent bien dans leur vie et bien je m'en réjouis pour eux.

[nunu]

C'est juste de l'ignorance et à pres tout si les autres se sentent bien dans leur vie et bien je m'en réjouis pour eux.

ben alors dans c'est moment là, ils se renseignent plutôt que critiquer et dire des con.....