Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

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Mélina
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Enregistré le : mardi 01 février 2011 21:08

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Mélina »

Je ne sais pas comment décrire, dire ce qui me conduit à manger sans faim et sans discontinuer. Alors j'ai écrit ce texte. Il y a des "gros mots" dedans, comme disent les enfants, et de l'agressivité. J'espère qu'il ne sera pas censuré. C'est juste le récit de ce que je vis, ressens, "en pays d'hyperphagie".

8h20: je me lève... Café en route.
Un verre d'eau, tout de suite, boire un verre, je n'en ai pas envie, mais il faut. Avant d'émettre la moindre pensée, la moindre envie"... Je bois mon verre, m'auto-congratule: C'est bien. J'interroge mon ventre, mon cerveau, mon palais: Faim? Pas faim? Envie de pain? De chocolat? De pâtes? De boeuf?... Ca chatouille, ça tiraille un peu, dedans: pas faim, mais envie. Oui, envie. Mais petite, toute petite, je le jure, elle est toute petite, cette envie. Contrôlable. Contrôlable. OK. Tout va bien, tout va bien,t'inquiète pas. La situation est sous contrôle.

Café, les infos à la radio.
Faut que je me concentre sur les infos, ne pas penser au... chocolat, au boeuf, aux pâtes, au... STOP!
Un bout... juste, un bout de chocolat, avec un peu de pain. Juste un peu? C'est le matin. Après tout, les gens "normaux", ils mangent le matin.
Les gens "normaux", oui. Pas moi. Parce qu'après je fais n'importe quoi, je ne sais pas m'arrêter, et après je me déteste.
Juste un petit peu, pour le calmer ce petit tiraillement, là. Et puis le goût du chocolat, fort et doux, dans la bouche, et la sensation lourde, épaisse du pain dans le ventre gonflé, repus...
Allez juste un bout. Un bout debout, dans la cuisine, pour faire comme si ça n'avait pas exister, surtout parce que je n'ai pas la patience d'attendre de me mettre à table pour manger. Un bout, c'est bon.
Encore un peu, juste un peu? Non! Bon, si, allez, encore un peu...
Oh! Et puis tant qu'à faire, autant finir la plaquette et la baguette. Comme ça après, je serais calmée. Je n'y reviendrai pas. Autant "mettre un bon coup", je limiterai les dégâts et je ne me torturerais pas toute la journée. Une plaquette, une baguette.
C'est bon, le chocolat, mais trop de sucre, là, envie de salé, de fort. Le boeuf? "C'est pas gras, le boeuf..." Allez, le morceau de boeuf, toujours debout, avec les doigts, les tranches de rosbeef, dans la cuisine. A grosses bouchées. A peine le temps de mâcher.
Ouai, le boeuf, c'est bon, mais faut l'accompagner... Les pâtes? De toute façon, ce soir, ce sera trop tard pour les manger, même dans le frigo, elles vont sécher... Et en avant pour la gamelle... Après, si tout va bien, j'vais m'arrêter, je serais "rassasiée", rassurée...
Bon, c'est fini, là, la fringale?
Euh.. encore un p'ti peu?... Y'a pas des gâteaux qui traînent, là, parce que les pâtes, ça remplit, mais c'est un peu fadasse...et puis ça fait comme si je prenais un dessert, ça fait comme si j'avais pris un repas normal... comme les gens "normaux""...
J'attrape la boîte de gâteaux... Toujours debout, dans la cuisine, un, deux, trois, quatre, cinq, six, gâteaux, sept, etc... la boîte est finie...
bon, là, y' a plus rien de toute façon. Je vais retourner m'assoir, boire mon café, ça devrait me suffire. Je retourne m'assoir. Une minute, deux minutes. Et M....!
J'vais à la boulangerie du coin, j'm'en paye une bonne tranche et après, on en parle plus!
-Bonjour, qu'est-ce que vous désirez?
- Euh, ben, j'vais vous prendre une baguette... et... un pain au chocolat, euh, non, deux pains au chocolats... et puis deux croissant, ah, oui et puis deux cookies, un éclair au café, un hot-dog... (mais, tais-toi, bordel, tais-toi, arrête-toi...)... euh, une quiche lorraine, deux canelés ("STOP!")... et un brownie... Voilà ce sera tout, merci. ("ce sera tout: andouille, tu crois qu'elle a pas compris, la dame, que t'allais tout t'empiffrer...")
Sur le chemin du retour, en train d'avaler un pain au chocolat (je ne peux pas attendre...): bon, ok, là, tu craques, mais au moins une fois que tu auras craqué, tu seras débarrassé, mais puis là t'en as quand même pour quelques minutes avant d'avoir tout englouti...
Je me pose je mange, j'avale, j'englouti.
Ca va aller, ça va aller, après tu vas arrêter. Profite en attendant, profite, parce qu'après tu vas être obligée d'arrêter. Pour toi, pour ton bien.
pu...., c'est bon, quand même. C'est bon de bouffer tout ça. Tout ça? Mais c'est déjà fini... M...., j'en ai pas bien profité... Mais au moins, là, c'est sûr, j'ai plus faim... Oui, j'ai plus faim... Mais j'ai encore ENVIE.
Quelques secondes de pause. J'ai tout mangé. Est-ce que j'en encore envie ? Est-ce que j'en ai encore besoin ?
Oui, oui, disent en choeur, mon cerveau, mon palais et mon ventre. Encore. Besoin.... Envie...
Fais péter le supermarché!!!!!!!
Non, j'peux pas. C'est déjà trop. Je vais le regretter. Je vais me sentir grosse, lourde, moche, molle. Je vais me détester... et tout le chemin à refaire, à nouveau, pour croire que je peux contrôler... que je peux maîtriser, à nouveau, que je peux à nouveau avoir envie de maîtriser...
Oui, mais... mais...
Mais pu...., je m'en fous des autres, je m'en fous d'être grosse.... d'toute façon, ch''uis mal, alors ça me sert à rien d'être mince!
J'ai envie de bouffer, de me goinfrer. Je vous emmerde, et je vais prendre tous les plats en sauces, toutes les boîtes de raviolis, toutes les pizzas, tous les paquets de gâteaux, et tous les desserts au chocolat, et des chips, et du pâté et du saucisson, et du tarama, et je vais tout avaler, tout engloutir, les uns après les autres, à en avoir la sensation que ça ne s'arrêtera jamais, parce que je ne veux pas que ça s'arrête... parce que je ne veux pas m'arrêter! J'vais tout laisser partir, tout laisser se déchaîner, je fais péter les barrières, pas de limite, pas de contrôle, plus aucun contrôle! Des saveurs, des saveurs, me sentir vivante! Bouffer à plus pouvoir me lever, le ventre plein et tendu à le tenir de mes mains, bouffer à en avoir les yeux qui piquent, bouffer à en tomber d'épuisement... et j'irais mieux, pu...., au moins, j'irais mieux...

Direction le supermarché. Même pas pris de douche. Je sais que je vais remplir un caddy, dans la colère, et la jouissance de la colère. Je sais que je vais tout manger. Et ça me remplit d'une joie agressive, à la fois triomphante et coupable. En attendant l'affaissement du "trop-plein".
Et je sais que demain, j'aurai la gueule de bois.
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béance
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Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par béance »

Mélina,

Ton récit est vraiment très poignant, très bouleversant...
C'est un univers angoissant. De toute manière tout ce qui est "sans limite" est angoissant...
J'ai réussi à "te suivre" jusqu'à juste avant la boulangerie.
Après je me suis demandée comment tu pouvais encore avoir envie...
En fait ce qui te limite c'est ton corps, et j'ai envie de dire heureusement qu'il est là pour te dire "stop" .

En fait j'ai l'impression qu'au début de ton repas tu es beaucoup trop sévère avec toi même.
Après tu relativises et tu t'autorises de manger des choses pour lesquelles ça devrait être "permis d'emblée".
Normal quoi, c'est le petit déj, on mange.
On dirait que dès que tu cèdes sur un truc, c'est "fichu" pour la suite...
Parce que tu te dis "au point où j'en suis, autant ne pas faire les choses à moitié", et ça dérape...

Est-ce que ça arrive que d'emblée tu te dises : "je vais me faire un p***** de petit déjeuner !" ?
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Mélina
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Enregistré le : mardi 01 février 2011 21:08

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Mélina »

Béance,

Merci de ton commentaire. Il met en avant des choses que j'ai trouvé justes.
Oui, ça m'arrive de me dire, "je vais me faire un "p... de petit-déjeuner", tous les jours en fait, une baguette entière tous les matins, à dire vrai... J'essaie de me faire plaisir le plus possible en fait, côté bouffe. Justement pour prévenir les moments où la "bête dévoreuse" se réveille, et ne pas lui donner de carburant supplémentaire avec de la frustration en plus de la souffrance.
C'est vrai qu'il y a sans cesse en moi une caméra posée sur cette "fringale" ou sa survenance possible. Je "surveille la bête", j'ai peur. C'est quand je me lève avec une sensation de tiraillement intérieur, de blessure, que je me montre la plus sévère avec moi-même, et que je craque d'autant plus...
Dans le texte, je parle d'envie, mais en fait je crois que c'est davantage une façon de se défouler, un besoin irrépressible, une façon de dissiper la souffrance, d'abaisser la tension émotionnelle. C'est comme une défonce, en fait.
Il faudrait sans doute que je laisse ce besoin me submerger, afin, peut-être, de l'amoindrir. Mais ce comportement me fait trop honte aussi pour que je puisse l'accepter.
Et tu as raison de dire que c'est mon corps qui me dit stop. Quoique, parfois, je suis allée au-delà des limites de mon corps, jusqu'à la bonne crise de foie!
Je n'avais plus ce comportement depuis des années. Il est revenu avec la dépression. Je pense que ce n'est pas par la contrainte qu'il disparaîtra. Je compte sur ma thérapie, je me dis que si je suis soignée, le tiraillement intérieur cessera, et la "bête dévoreuse" se rendormira...

Merci, en tout cas, de l'intérêt que tu as porté à mon récit.
Je ne suis pas très douée pour le dialogue, l'échange, mais si tu veux bien me dire comment tu le ressens, chez toi, ce type de comportement, je le lirais avec plaisir.

Mélina
Onagre

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Onagre »

Bonjour Mélina, ton post me touche énormément :newblush:
J'ai l'impression que tu décris ma journée.

Perso je n'en peux plus de ce cauchemar, comme toi je suis très sévère avec moi-même, au point de me priver de manger durant des jours entiers.
Puis quand le craquage est inévitable... c'est affreux, et la culpabilité me rend folle de semaine en semaine.

Merci pour ton récit, ce que je vais dire est très égoiste mais ça fait du bien de ne pas être seule dans ce monde pénible de l'hyperphagie :crying:

Je t'envoie plein de courage et d'amitiés, merci Mélina :bisouss: :offre:
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Lillirose
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Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Lillirose »

Bonjour melina , ta vie est un enfer mais ton enfer n a d' egale que ton talent !!!! Ton récit est absolument fantastique!!! Tu dois prendre conscience que tu as un véritable talent d' ecrvain !! Tu dois absolument coontinuer a écrire !!! Je ne peux pas régler ton problème car bien qu en moins violent j ai le même . En revanche je n ai pas ton talent !!!! Si je l avais j aurais déjà écris un livre sur ma vie ! Fais le ! Ça va passionner des milliers de femmes dans ton cas qui ne le disent pas et sûrement pas aussi génialement !!! Ça ne peux que t aider en plus a exorciser cette " bête dévoreuse" dont tu parles si bien ! Dis moi que tu vas le faire !!! Lillirose.
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Knokke-le-Zoute
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Enregistré le : mardi 08 février 2011 20:29

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Knokke-le-Zoute »

Bonjour Melina, Béance et Onagre.

Je prends conscience en vous lisant que la plupart de mes pulsions alimentaires sont nocturnes.
J'ai écrit un message sur la post qui s'intitule "hyperphagie", j'ignore s'il est possible de le déplacer ici.

Ton message initial, Mélina, me parle beaucoup, ou plutôt parle beaucoup à celle que j'étais il y a un an.
Il est violent, bouleversant, et terriblement "réel".

Il a du te falloir beaucoup de courage pour l'écrire.
Knokke.
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Mélina
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Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Mélina »

A vrai dire, je dois reconnaître que ce n'est pas une histoire de courage de ma part. Chez moi, l'hyperphagie est liée à la colère. C'est la colère qui me fait manger autant, c'est une pulsion d'agressivité que je retourne contre moi-même.
Au moment où j'arrive à écrire ce texte, c'est tout simplement que je parviens à faire emprunter à la colère un autre chemin: je déverse l'agressivité dans les mots au lieu de la faire passer dans ma compulsion. Ce n'est pas volontaire: c'est arrivé au lendemain d'une "crise". C'est cette crise que j'ai raconté. Mais il m'a fallu passer par celle-ci avant de prendre conscience que la colère était revenue.
Le courage et le contrôle ne devrait pas entrer en ligne de compte, selon moi. Je ne crois pas qu'on puisse résister à l'hyperphagie, et je ne suis même pas persuadée qu'il faille essayer de le faire. Il me faudrait voir, identifier la colère quand elle monte et trouver une façon de l'exprimer pour ne plus me comporter ainsi. Le second temps serait de trouver l'origine de cette colère, de quel conflit intérieur elle provient, pour la faire disparaître.
Ceci dit l'hyperphagie est paradoxalement un signe encourageant dans mon histoire: elle a réapparu après que j'ai réussi à identifier quelques ressentis personnels.
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Lillirose
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Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Lillirose »

Bonjour melina ! Tu ne m as pas répondu quand au livre que je t ai conseille d' écrire. Et pourtant tu dis toi même que c est la même colère qui te pousses a manger et qui te pousses a écrire !!!! Alors sers t en de cette colère !!! Racontes chaque journée dans un cahier comme tu l as fait sur ce forum !!!!! Fais le !!!! Je suis sûre que ça peut te sortir de cet enfer . Crois moi tu as un vrai don !!! Je sais bien que tu préférerais que je te dise comment faire pour ne plus manger . Et bien tu as la solution a portée de main !!! Écrire empêche de manger !! C est ce qui m arrive depuis que je vais sur ce forum figures toi !!! Moi aussi j ai des crise et même si elles sont moins importantes que les tiennes jà galere drôlement aussi . Mais tout le temps que je passe ici j arrive a ne pas manger . Alors fais le !!! Ne gâches pas un talent pareil !!! Et réponds moi vite pour me dire que tu vas t y mettre !!!
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Mélina
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Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Mélina »

Merci, lillirose. Je suis touchée par tes mots. Je te présente mes excuses, j'avais "zappé" ton message... Petit acte manqué de ma part, sans aucun doute. J'écris au fur et à mesure de mes besoins. Je ne peux pas promettre d'en faire quelque chose un jour, ce serait une contrainte, un engagement que je ne suis pas sûre de respecter. Je n'ai pas les moyens aujourd'hui, émotionnels et moraux, de m'engager sur quoi que ce soit, j'en ai peur à vrai dire.
Je suis "sur le chemin de mes propres émotions", un chemin que je n'ai jamais parcouru, un certain "égoïsme" est de rigueur pour moi aujourd'hui, pour aller mieux, pour guérir.
Cependant, je serais heureuse si le partage de mon vécu, mes ressentis et "images" personnels peut apporter en miroir quelques pistes aux autres, quant à leurs propres ressentis et cheminements intérieurs.
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Lillirose
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Message par Lillirose »

Merci melina de m avoir répondu . Tu as bien raison quand tu dis que tu dois être égoïste !!! J adhère complètement ! Ne penses qu a toi et a ce qui peux te faire du bien !! Ça ne m empêche pas de penser a ton talent ! Qui plus est tu m as aussi aide dans ma propre démarche ! Tu vois en écrivant tout le bien que tu fais !!!! Cela dit je ne veux pas te bousculer je comprends que tu ne.veuilles pas t engager dans autre chose que ta démarche pour guérir . Je me contenterai donc de ce que tu voudras bien raconter dans ce forum . J espère te relire très vite et surtout j espère que tu vas aller mieux ! Biz .
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béance
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Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par béance »

Coucou Mélina,

J'ai lu ton dernier texte dans ta galerie.
Et comme tu n'as pas l'air de salon, je viens d'en parler ici.
Ca te dirait pas d'en créer un ?

Ca me parle pas mal cette histoire de limite...
Moi aussi je pense beaucoup en ces termes.
Je cherche une limite comme je cherche un point de référence.
Parce que la limite, c'est un peu comme une entité de référence qui te dirait comment penser, comment se comporter.
Un truc qui ferait sonner une alarme quand tu dérayes...
Un truc qui t'évite de te prendre la tête quoi...
Ca serait bien sympa d'avoir une telle "chose" à porter de mains quand on ne sait pas quoi faire, quand on n'arrive pas à savoir ce qu'on veut...
J'ai l'impression qu'on cherche une sorte d'"autorité" à l'extérieur parce qu'on ne la trouve pas à l'intérieur.
Une sorte de rigidité, un truc qui tranche.
Parce que nous on sait pas trancher.
On se pose trop de questions pour trancher.
Même choisir entre un croissant ou un pain au chocolat c'est difficile...
Au point que parfois on laisse l'autre choisir pour nous...

Ce qui rend les choses difficiles c'est qu'elles sont rarement "ceci ou cela".
Il y a une certaine continuité entre certains concepts, et effectivement on peut se demander "à partir de quelle dose de responsabilité passe t-on à la culpabilité ?".

C'est comme ça aussi en psychiatrie. Il y a une continuité entre le "normal" et le pathologique. Et c'est bien pour ça qu'être "normal", ne veut rien dire en soi... Parce qu'on a tous des tendances pathologiques. On a tous au moins un ptit truc qui tourne pas rond. Après c'est une question quantitative : "dans quelle mesure je gère (ou pas) mon petit (ou gros) grain de folie ?". Certain sauront gérer leur gros grain, et d'autres ne sauront pas gérer leur petit grain... C'est ça la subjectivité. Y'a pas de référence... Et ça, on ne l'accepte pas. Parce qu'on a besoin d'être fixé. Faut renoncer à être fixé, à être défini. On est tellement de choses qu'on ne peut pas être défini avec un seul signifiant... Ca serait tellement réducteur qu'on nous dise : toi tu es ceci, toi tu es cela. D'ailleurs la psy qui t'a dit en 5 min de consultation que tu étais bipolaire, bah tu l'a fuie, c'est pas ça que tu voulais entendre. Ou alors peut-être que justement, c'était ça, mais que finalement, être défini, ça n'a pas eu l'effet que tu espérais...

Conclusion... bah pas de conclusions... renonçons, même à une conclusion...
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Mélina
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Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Mélina »

Béance,

Beaucoup de choses sont justes dans ce que tu as écrit, le besoin de repères, de catégoriser, etc. Rationalisation rassurante, mais aussi cloisonnante, voire aliénante, en regard d'émotions que l'on ne parvient pas à débusquer, définir, surmonter, ou canaliser. A vivre, tout simplement.
A propos de limite cependant, je ne le perçois pas de façon aussi tranchée, nette. Je le conçois plutôt comme une "zone frontière", un espace de rencontre entre deux choses, davantage que comme une ligne tranchée (tranchante, ai-je envie de dire, comme une guillotine).
J'ai pensé au terme "limite" à cause du mot "sublimer", et de l'expression "ne pas avoir de limites"... Mais si je parvenais à me comporter en ayant des limites, ces limites je les imagine plutôt à la façon d'un espace-frontière, une zone d'interpénétration, seule façon finalement de concilier les contraires, l'extérieur et l'intérieur, etc... C'est très abstrait ce que j'écris et je suis loin de savoir comment me comporter pour parvenir à vivre avec ce type de limite...

Par rapport au fait que j'ai fui la psychothérapeute qui m'a diagnostiquée bipolaire. Très sincèrement, je n'ai pas été gênée par le diagnostic lui-même, mais par la façon dont il a été posé. Que je sois bipolaire ou pas, d'ailleurs, n'est pas la question. Et si la psychologue et le psychiatre qui me suivent aujourd'hui diagnostiquaient une bipolarité, je n'aurais a priori aucune raison de ne pas avoir confiance en leur diagnostic s'ils pensent que j'en présente les symptômes.
Un diagnostic c'est d'abord une façon de décrire des processus internes, pour permettre éventuellement de les soigner. Quel qu'il soit, mon seul souhait est que ce diagnostic soit le plus juste possible.

J'ai côtoyé, en tant qu'amis, de nombreux psychologues et psychothérapeutes, d' "obédiences" différentes. J'ai eu pour amis aussi quelques bipolaires. Et j'ai vécu plusieurs années avec une personne bipolaire, plusieurs années penchée, avec mon ex-compagnon, sur les différentes théories psychologiques quant à cette maladie, les différentes thérapies, sans oublier les querelles de classification du DSM, etc.
Je ne suis pas psychologue. Mais j'en sais assez pour savoir en tout cas qu'on ne pose pas un diagnostic de bipolarité en 5 minutes, à plus forte raison pour quelqu'un qui a vécu récemment un choc. De l'ensemble des symptômes que je lui ai décrits, elle n'a retenu que la labilité émotionnelle. Labilité émotionnelle que l'on retrouve chez toute personne venant de vivre un traumatisme. Ce que l'on appelle "être à fleur de peau". Au mieux, c'est de l'incompétence, au pire c'est de l'inconséquence.

Je lui ai d'ailleurs fait remarquer poliment que le changement d'humeur n'était pas uniquement l'apanage du trouble bipolaire. Elle m'a répondu: "Oui, je ne dis pas que vous êtes bipolaire" (elle venait de le dire, littéralement, expressément, 30 secondes avant, mais je ne le lui ai pas fait remarquer).
Sur le coup, en fait, je n'ai pas été vexée par ce qu'elle me disait, ni même choquée ou angoissée (à vrai dire, la phrase que j'ai eu en tête c'est: "Encore une qu'a eu son diplôme dans une pochette surprise! A ce compte-là, j'ouvre un cabinet de psy demain, moi aussi..."). Je me suis dit que cette personne avait peut-être de très bonnes recettes pour aller mieux, mais que, de mon point de vue, elle n'était pas assez calée, ou expérimentée (rien que le fait qu'elle remette en question ses propres affirmations d'une phrase sur l'autre n'était pas très encourageant.) et que je ne pourrais jamais guérir en étant suivie par quelqu'un dont je puisse douter des compétences. Il faut un minimum de confiance en la compétence de son thérapeute, cette confiance était sapée dès les premières minutes.

Par ailleurs, je dois dire que la méthode qu'elle me proposait était davantage tournée vers le comportemental, et je savais que ce type de thérapie, à ce moment-là de mon existence, ne serait pas pertinent. Non pas que je le rejette en soi, loin de là, mais compte tenu des "données intérieures" qui étaient les miennes et de l'épisode que je traversais, je savais que ce type de thérapie manquerait d'efficacité.

Quant au fait d'avoir un salon, j'avoue y avoir songé, mais j'ai eu peur de ne pas en avoir les épaules, tout au moins pour l'instant. Tout simplement parce que j'ai peur de ne pas être suffisamment présente sur les salons des autres. Les salons s'enrichissent sur le mode du donnant-donnant, c'est un engagement implicite à mes yeux. Et je ne sais pas si je suis prête pour cet engagement implicite. Disons que pour l'instant, c'est une espèce de liberté, égoïste c'est vrai, que je m'accorde. Après, si l' "éparpillement" de mes interventions agacent, je m'y plierais sans râler, car ce n'est pas non plus une contrainte insurmontable.

--edit--

Je me rends compte que je ne t'ai pas répondu sur la question du choix.
Paradoxalement, même si je suis quelqu'un qui n'a pas de limites, ma réaction première est de répondre que je n'ai pas de problème de choix. A priori, je suis quelqu'un qui choisit et qui tranche assez facilement. Il me semble que mon problème n'est pas une question de choix, mais plutôt "jusqu'où je vais trop loin dans ce choix".
De la même façon, j'allais écrire, spontanément: je n'ai pas de problèmes d'envie, je sais toujours quelles sont mes envies. Paradoxal, là aussi, pour quelqu'un qui ne sait pas identifier ses émotions... A creuser, donc. Merci.
Diana

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Diana »

Mélina a écrit :
c'est une pulsion d'agressivité que je retourne contre moi-même.
Au moment où j'arrive à écrire ce texte, c'est tout simplement que je parviens à faire emprunter à la colère un autre chemin: je déverse l'agressivité dans les mots au lieu de la faire passer dans ma compulsion.
Qu'est-ce que je te comprends...

Moi ça fait longtemps que je ne vis plus ça, mais ton texte est en effet très fort.

Pour la colère, c'est un gros débat....J'étais pareille....je suis passée par là, aussi par l'alcool, les joints et toute "drogue" possible. C'est la dépression qui a fini par ravager tout ça (une chose de bien qu'elle aura fait). Je n'étais même plus à même de me mettre en colère, alors qu'avant un rien me poussait à ce que tu écris, voire à agresser. Mes amis me craignaient de ce côté là.
La dépression a été le pas ultime sans doute: finir par la retourner vraiment et concrètement contre moi cette colère. Jusqu'à m'anéantir. Et comme tu le dis dans ta galerie, même le suicide m'étant interdit (alors que j'ai fait de fabuleuses crises suicidaires), la souffrance que je m'imposais en était encore plus importante.
Depuis ma dépression, la colère semble s'être transformée en autre chose, avoir pris un autre chemin. Et ces accès là aussi, par la même occasion.

Moi aussi les mots m'ont aidée. Je ne me donnais sans doute pas de droits avec les autres, mais avec "mes"mots, si. Et là, j'existais, je m'appréhendais. Continue, ça va te soutenir contre toi même.... :bisouss:
Mélina a écrit :

Quant au fait d'avoir un salon, j'avoue y avoir songé, mais j'ai eu peur de ne pas en avoir les épaules, tout au moins pour l'instant. Tout simplement parce que j'ai peur de ne pas être suffisamment présente sur les salons des autres. Les salons s'enrichissent sur le mode du donnant-donnant, c'est un engagement implicite à mes yeux. Et je ne sais pas si je suis prête pour cet engagement implicite. Disons que pour l'instant, c'est une espèce de liberté, égoïste c'est vrai, que je m'accorde. Après, si l' "éparpillement" de mes interventions agacent, je m'y plierais sans râler, car ce n'est pas non plus une contrainte insurmontable.
C'est vrai. Prends ton temps... :bisouss:
julie69
Messages : 3
Enregistré le : vendredi 04 mars 2011 9:26

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par julie69 »

Bonjour Melina et Bonjour à toutes,
J’ai curieusement bien ri en lisant ton texte dans lequel je me reconnais parfaitement. Tu as réussi raconter avec humour et talent le quotidien cauchemardesque des hyperphages… Car il s’agit bien d’un cauchemar que l’entourage ne comprend pas hélas et qui pourtant nous ronge chaque jour un peu plus.
Comme vous je souffre d’hyperphagie et ce depuis 3 ans maintenant. Tout a commencé la première fois où j’ai arrêté de fumer. J’ai alors pris 15 kilos en à peine 4 mois l’horreur ! Je pouvais alors engloutir 1 pain complet + 2 baguettes en ½ heure à peine, et enchaîner sans problème avec 4 Mars et 2 paquets de gateaux… et rebelote 3 heures plus tard !
J’ai tout essayé pour contrer le problème, y compris ce qu’il ne fallait absolument pas faire : les régimes hyperprotéinés ! Et finalement, j’avais en plus repris la clope ! Bref, j’avais tout gagné : 15 kilos sur les fesses, la reprise du tabac et la déprime en plus ! Sans parler du petit copain qui n’osait même plus me toucher tellement j’avais changé !!
2 ans plus tard, à l’aide d’antidépresseurs, de sport, d’une psy et d’une diéteticienne, j’ai réussi à calmer mes angoisses, diminuer considérablement les crises et perdre ces kilos un par un, doucement mais surement… Le bonheur…. Je pensais alors en avoir enfin fini avec ces crises, je renaissais….
Malheureusement, mes crises ont recommencé en janvier dernier, avec encore plus de virulence que par le passé. Chaque jour je commence mon régime, jusqu’au moment où je vais me baffrer avec tout ce qui me passe sous la main (y compris le Nesquik en poudre !!). Je me dégoute. Déjà plus de 5 Kilos pris en 2 mois… L’horreur.
Et comment expliquer cela ? Les gens me regardent et me disent « dis donc, tu t’es un peu laissée aller pendant les fêtes ! » . Et j’ai envie de leur répondre que s’il n’y avait que les fêtes !!!
Bref, comme vous j’ai besoin de réconfort et je pense qu’ici je pourrais peut-être en trouver car au moins vous savez ce que j’endure… Y a-t-il parmi vous des lyonnaises ?

Bisous et bon courage à toutes
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lilith
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Enregistré le : jeudi 13 décembre 2007 16:30

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par lilith »

Ah ben quand ej disais dans ton salon qu'y a des trucs qui me aprle ...... que ce soit ce texte ou celui sur les limites dont parlait Béance ......

la crise, direction el super marché et surtout le choix, insicif et rapide, précis : on sait quoi et dans quel ordre, jusqu'à exploser, jusqu'à vomir en ce qui em concerne ...... :dub:

et pis ensuite ??? calmée ???? non .... une nouvelle crise, jusqu'à ne plus faire que ca dans la journée : enchainer les crises .... :vue0:

ca c'était calmé .... et pis c revenu....

de mon coté c l'arret de l'alcool qui fait qu'aujourd'hui j'évacue colere et frustration dans la bouffe je pense ... el sport ne suiffit pas, le sport demande un effort avant tout ...

et les limites .... avec l'alcool c simple : pas du tout, rien, nada, pas une goute ..... avec la clope pareil .... donc arreter c compréhensible : c'est plus rien .....
mais avec al bouffe ???? on fait quoi ? on fait comment ,?? c ou la limite juste ? la limite normale ???? :attente:

prends ton temps ici, dépose ce que tu souhaite y déposer... merci de partager...

:console:
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béance
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Enregistré le : dimanche 02 mars 2008 18:24

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par béance »

Coucou Mélina,

Je réponds un peu tard, désolée.

Je me rends compte que dans tout ce que j'ai écrit, je me suis un peu trop centrée sur moi. Je crois que j'ai confondu "points communs" et "ça me parle". En gros ce n'est pas parce que ton texte me parle bien qu'on est pareilles. Je suis allée trop vite. En tout cas ta réponse est assez éclairante. Je trouve que tu décris extrêmement bien ton mode de fonctionnement. Et figure toi que ça aide ceux qui te lisent à se situer. Je me suis dit "ah mais non on ne fonctionne pas pareil du tout, moi des limites, je m'en mets trop...en bonne névrosée que je suis...".

Mais je t'avoue que j'ai du mal à faire la part des choses entre ce que je vis, et ce qui m'intéresse. Donc si ton texte me parle c'est aussi parce que c'est une mine d'or, quand on est psy, et je le suis, de lire des textes tels que les tiens tant ils sont "justes". Tu arrives à décrire des choses très complexes et ce de façon très fluide.

Pour la question des limites, j'imagine une sorte de continuum avec un dégradé de couleurs. Tu te rends compte qu'on est en train de modéliser un concept là ? :rire2:

Concernant la "bipolarité", c'est effectivement très très complexe... et j'avoue qu'à l'heure actuelle je ne suis pas du tout calée. Je n'ai que 25 ans et pas d'expérience à ce sujet alors je pense qu'on m'en excusera... Sans compter que je suis un peu à l'ouest de mon métier depuis quelques temps on va dire...

Enfin bref, au plaisir d'échanger avec toi :wink2:
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Mélina
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Enregistré le : mardi 01 février 2011 21:08

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Mélina »

Béance,

Tu n'as pas à t'excuser de ton pseudo-egocentrisme, ni de ta jeunesse, ni de ta pseudo-incompétence.

Que tu aies compris ce que j'écrivais en fonction de ton expérience, de tes connaissances et de tes ressentis, est une chose parfaitement naturelle et incontournable. D'ailleurs, puisque tu es psy, le meilleur des thérapeutes percevra toujours le monde et le discours de l'autre à travers son prisme et ses projections personnelles. C'est le propre de toute compréhension.

Et en l'occurrence, ta pseudo-erreur de compréhension fut fructueuse: elle m'a obligée à préciser ma pensée, que tu as comprise, et elle t'a apporté d'autres choses. Nous sommes donc "gagnantes" toutes les deux dans cette avancée à tâtons vers l'expression de soi et la compréhension de l'autre: c'est là l'irremplaçable richesse d'un dialogue.

A priori, j'ai cependant, et là tu as vu juste, j'ai des points communs avec toi: avant d'entrer en phase dépressive, j'étais tout comme toi quelqu'un de très contraint, avec beaucoup de limites auto-imposées et d'interdits, et je ne savais pas vraiment si je faisais les choses parce qu'elles m'intéressaient. C'est l'avantage de ma dernière mésaventure et de l'épisode dépressif que cela a entraîné: tout cela a complètement explosé. Il m'a bien fallu admettre que cette personne très contrainte et socialement adaptée n'était qu'un joli petit personnage bien verrouillé, mais qui me permettait surtout de cacher et d'enterrer vivante l'autre part de moi, cette part si dérangeante parce qu'elle ressentait des choses qui ne collaient a priori pas avec mes attentes et mes valeurs "officielles".

La colère et l'hyperphagie qui y est liée proviennent effectivement de ce joug que je me suis fait subir pendant des années.

Ma "chance" également est d'être passée du jour au lendemain, à cause d'un choc, de ce personnage hyper-contraint qui n'avait aucun accès à ses ressentis à une personnalité à la psyché effondrée, aux émotions exacerbées et sensations chaotiques et violentes (l'expression anglaise "exploding the self" me vient à l'esprit pour décrire ce qu'il s'est passé en moi: tout a volé en éclat, tout m'a explosé à la figure).

En fait, et je pense que cela peut t'intéresser vu ton métier, cette idée de limites et de canalisation des émotions, de zone-frontière entre moi et les autres, m'a été inspirée par la lecture de Winnicott et de Didier Anzieu. Je dis bien "inspirée", car très souvent je ne lis les théories psy qu'en diagonale, en quête d'une expression qui me parle, qui suscite quelque chose en moi, sans pour autant que ce soit le sujet dont parle l'auteur... Association d'idée, projection, etc...

Enfin, par rapport au fait que tu sois à l'ouest dans ton métier, ne t'inquiètes pas plus que ça. Comme tu le dis, d'une part, tu es jeune, j'ai des amis qui sont sortis de leur cursus psy à 27, 30 ans, voire plus. L'une de mes amies a passé son master 4 fois avant de l'avoir, c'est te dire... Elle aussi freinée par quelque chose qui bloquait en elle. Aujourd'hui, elle dit que si elle n'avait pas eu cette période de "fermentation", de reconsidération de soi, d'interrogations, sans doute se serait-elle plantée.

Et puis n'oublie pas que tout ce que tu fais, traverse aujourd'hui, et qui n'a a priori rien à voir avec ton métier, quand bien même cela te fait douter de toi et de tes capacités, est une richesse d'expérience qui va t'aider aussi dans ton métier. Même si de tout cela tu ne récolteras sans doute les fruits que plus tard.

Quant à la bipolarité, et au fait de poser des diagnostics... ça.... j'ai vu des psys qui avaient des décennies de métier et qui pourtant n'étaient pas d'accord entre eux...


Julie69,

J'ai été très intéressée, c'est étrange comme façon de formuler mais c'est la plus juste, par ta réaction: tu as ri en lisant ce texte.

Ca m'a fait penser à la jouissance morbide que j'ai eu à l'écrire, tout comme il y a une jouissance morbide à se vautrer dans l'hyperphagie, comme on se vautre dans un canapé moelleux. Ca m'a aussi fait penser que, oui, la perte de contrôle jusqu'à la caricature a quelque chose de risible, de comique. Même si cela me semble un comique un peu désespéré.

Pour revenir à l'hyperphagie elle-même, depuis qu'elle est revenue, j'ai cru au début que j'allais la contenir. Je me suis rendue compte que je n'y parvenais pas. Pour la première fois de ma vie, je ne contrôle absolument plus rien dans mes comportements. Soit j'identifie et j'accepte une émotion, auquel cas les symptômes disparaissent. Ou bien je la subis, et les symptômes restent.
Résultats des courses: j'ai pris pas mal de poids en peu de temps alors que ça faisait près de 7 ans que je bougeais à peine de deux kilos en hiver. Mais tant pis. Pas le choix. Je vais apprendre la patience. Je vais apprendre à ne pas faire les choses dont je n'ai pas la capacité. Tant que les émotions continuent d'exploser en geysers en moi pas la peine de faire comme si elles n'étaient pas là. Et je sais que ce n'est pas en me contraignant que je les canaliserai.
Quant à la cigarette, ça fait 20 ans que je fume, je n'ai jamais eu envie d'arrêter. D'une certaine façon, c'est la seule "liberté" que je m'étais octroyée durant toutes ces années. J'ai toujours pensé que je n'avais pas réuni des conditions de vie assez sereines pour me permettre ce type de changement, je crois que je n'avais pas tort.

Lillith,

J'aime bien quand tu écris: " et surtout le choix, incisif et rapide"... cette phrase en réveille une autre dans ma tête: "Tiens, prends ça!" un peu comme une vengeance, comme une jubilation de la souffrance, et de la peine infligée. Et là mon cerveau s'arrête, je ne parviens pas à avancer, à en dire davantage sur cette jubilation de la colère, sur cette vengeance.
Juste cette évidence: il faudra bien qu'elle sorte cette colère un jour... Il faudra bien que je la dise.
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lilith
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Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par lilith »

vengeance / défouloir / punition ... de soit, des autres ...

besoin de plaisir immédiat, de consolation, tout en sachant qu'on "creuse sa tombe" ...

exactement les memes mécanismes que les alcoolo et les toxico ... une addiction... une fragilité ? tu parle de colère ... si tel est le cas elle est tournée contre soit non ?
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Mélina
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Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Mélina »

Lilith,

Il se peut que dans certain cas ce soit une colère tournée contre soi-même.

Dans mon cas, ça se rapproche plus de la vengeance, défouloir et colère tournée contre les autres. Contre les injonctions sociales, contre une pression sociale, une image qu'on attend de moi (toutes choses qui ne sont en fait que des pressions que je m'impose à moi-même et qui ne correspond pas à ce que je ressens, à mes besoins.

Depuis de nombreuses années, j'ai un rapport contraint au monde. Je me sens obligée de correspondre à une image "parfaite", de me comporter de façon "normale", dans tous les sens du termes, mais plus particulièrement dans le sens de ce celui correspondant à une norme.

Trop manger est à l'époque moderne assimilé soit à un laisser-aller, soit à un désespoir. Notre époque est celle d'un "esprit sain dans un corps sain". La santé psychique est assimilée à une implication forte dans la société et surtout le travail, la santé physique à la minceur et à l'activité physique. Au moment où je suis en crise d'hyperphagie, je suis surtout en train de dire: "je vous emm...de, je mange autant que je veux, les aliments que je veux, etc." C'est d'une certaine façon un acte de rébellion, une tentative de retrouver une liberté.

En général, mes crises d"hyperphagie arrivent dans la seconde partie de l'après-midi. Au point de vue physique, c'est le moment où je me réveille d'une sieste ou d'une somnolence, je sors du moment le moins actif de la journée: mon esprit est un peu "embrumé", c'est le moment où mes garde-fous personnels sont les plus faibles. C'est aussi le moment de la journée où j'ai une carence en sucre.
C'est aussi le début du déclin du jour: déclin qui a toujours été stressant pour moi. La fin de la journée comme une petite mort. C'est le déclin du jour, mais j'ai encore de longues heures devant moi et je me demande comment je vais les occuper, ça aussi c'est stressant. Et comme la plupart du temps, je n'ai pas de perspective de moments plus agréables devant moi, c'est le moment où les manques affectifs, d'échanges sont les plus forts.

La crise d'hyperphagie, c'est aussi la possibilité de vivre des sensations agréables, alors que mon quotidien est sans plaisir.

L'absence de limites est liée quant à elle à la colère comme je l'ai déjà dit, mais aussi à l'absence de "cadres internes": peu de choses que je ressens comme rassurantes et gratifiantes dans mon existence, qui me donneraient un équilibre. J'ai l'impression de marcher sans cesse sur un fil de ce côté-là. L'hyperphagie, c'est un vertige: vouloir la chute pour ne plus la craindre.
Diana

Hyperphagie: "Demain, j'arrête"

Message par Diana »

C'est sans doute une forme de lâcher prise, aussi, à un tel niveau de contrainte, non?
La solution, quand on y arrive, serait sans doute de plus se permettre de lâcher prise 'ailleurs' que dans la nourriture, plus en général sans doute.
Lâcher prise devant le regard de l'autre, lâcher prise devant à l'indifférence du monde par rapport à soi et à ses malheurs, lâcher prise surtout devant leur malheur, lâcher prise devant cette place qu'on veut à tout prix occuper et qu'on a pas à devoir justifier ni à occuper d'ailleurs. Lâcher prise devant les "je n'y arrive pas" divers qui constellent nos jours et finir définitivement par ne pas y arriver toujours. Lâcher prise devant cette normalité qui est plus feinte que réelle.
Et lâcher prise est sans doute possible quand on voit que personne et vraiment personne ne peut tout à fait être considéré comme "normal" à mieux regarder.
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