Doit-on s’attendre à une légalisation du cannabis en France dans les années à venir ?
La légalisation est déjà en cours. Officiellement reconnu pour ses vertus thérapeutiques (une qualité à laquelle ni l’alcool, ni le tabac ne peuvent sérieusement prétendre) et autorisé dans sa version « light », le cannabis voit désormais certains de ses usages normalisés par le droit. Si l’état du débat français, saturé d’idéologie, semble aujourd’hui exclure toute levée de l’interdit, le sens de l’histoire ne fait guère de doute. L’imposant corpus scientifique pluridisciplinaire qui analyse les politiques des drogues démontre que la prohibition a peu d’effet sur les niveaux d’usage mais qu’elle s’accompagne de nombreux effets pervers au nombre desquels la création d’un vaste marché criminel, la circulation de produits frelatés, et la marginalisation des consommateurs. Ce constat, partagé par les rapports officiels qui appellent tous, sans exception, à un abandon des politiques prohibitionnistes punitives, explique que de plus en plus d’Etats réglementent la production, la distribution et l’usage de cannabis à des fins récréatives.
Aux États-Unis, près de la moitié des États ont franchi le pas. Le Canada a fait de même en établissant un cadre réglementaire articulant logique de marché et impératifs de santé publique. En Europe, la majorité des pays ont d’ores et déjà dépénalisé l’usage de cannabis et plusieurs s’acheminent vers sa légalisation. Exemple emblématique de cette évolution, les Pays-Bas, qui jusqu’à maintenant toléraient la vente de cette drogue en coffee shops, expérimenteront, à partir de 2024, un dispositif de production encadrée par la loi. La détention et la culture de marijuana à des fins d’usage personnel est légale au Luxembourg depuis le 21 juillet. Enfin, l’Allemagne est sur le point d’autoriser la production et la distribution non-commerciale de cannabis par l’intermédiaire de Cannabis Social Clubs (associations à but non-lucratif réunissant des amateurs de chanvre).
Abroger l’interdit n’est pas dénué de risques sanitaires et sociaux, mais la politique française, dont l’échec est avéré et le coût considérable, ne résistera pas longtemps si ces expériences étrangères voient leurs premiers succès confirmés. Il convient donc de réfléchir dès aujourd’hui aux modalités d’une réforme inévitable afin d’éviter qu’à une prohibition mortifère ne succède une marchandisation aveugle à l’intérêt général. Ainsi la légalisation qui vient pourra-t-elle servir la santé et de la sécurité de tous dans le respect de la liberté de chacun.
Source : Le Club des Juristes (1ᵉʳ think tank juridique français) - 6 septembre 2023
Rappel :
Bien que la recherche sur la consommation de cannabis soit moins développée que celle portant sur la consommation d’alcool, selon les connaissances actuelles, l’alcool demeure de loin une cause plus importante de maladies et de décès que le cannabis.
Source : Institut national de santé publique du Québec
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