Un (long) message pour cesser les séances d'auto-flagellation lorsque notre volonté flanche...
Arrêter de fumer, faire un régime, se mettre au sport, ne plus passer des journées devant son ordinateur, sortir, voir du monde...
Les vaillants dépressifs et autres fragiles de la caboche que nous sommes se lèvent chaque jour ou presque avec chacun sa petite liste personnelle de ce que nous devrions faire pour aller mieux, nous sentir mieux dans nos baskets, avoir une meilleure image de soi, etc.
Du respect de ces bonnes résolutions, nous faisons souvent le gage de notre bonheur.
Dans notre trajectoire dépressive, nous connaissons quelques répits: ces moments où l'horizon se dégage, où on se sent plein d'énergie. Ces moments aussi où on ne comprend pas pourquoi on a attendu tant de temps avant de faire ceci ou cela, ces moments où on ne comprend pas pourquoi on a arrêté de faire ceci ou cela, qui nous fait pourtant tant de bien. Ces moments-là sont aussi ceux des "grandes" et "bonnes" résolutions.
Nous voici donc sur le chemin de la grande "rédemption": c'est promis, juré, cette fois-ci, on ne flanchera pas lors d'une faiblesse passagère, etc, etc.
Et puis vient le jour où, la pensée brumeuse, la gorge quelque peu nouée, et comme un début de lacération dans les tripes, un poids sur les épaules, la nuque, les jambes lourdes, on ne sait plus. On ne sait plus où est passée l'énergie, on ne comprend pas comment faire pour y voir à nouveau clair, et surtout, on n'a plus envie, mais alors plus envie du tout de se plier à nos si bonnes résolutions.
Et à notre fatigue et à notre lassitude s'ajoute l'effroyable culpabilité de n'avoir décidément aucune constance, de n'être décidément capable de ne respecter aucun engagement.
C'est l'heure de la grande flagellation et son cortège de questions culpabilisantes: pourquoi ne suis-je pas capable de faire du sport comme tout le monde? Pourquoi ne suis-je pas capable de maintenir un rythme comme tout le monde? Pourquoi n'ai-je aucune volonté?
La lassitude fait place à l'angoisse, c'est l'heure du grand plongeon dans les eaux troubles de notre être tourmenté, dans notre univers de la répétition destructrice, de la condamnation ad vitam aeternam à notre propre médiocrité, etc., etc.
Le problème, justement, c'est que nous sommes finalement comme tout le monde: comme tout le monde, notre volonté, notre motivation agit selon un rythme cyclique.
C'est tout au moins la théorie d'Arthur Freeman et Michel Nolan. Selon ces deux psychologues, notre motivation, notre capacité à changer évolue de façon cyclique. Un cycle dont les étapes vont en gros du refus de voir la nécessité du changement, à l'acceptation progressive de cette nécessité, la phase de préparation, le passage à l'action, le maintien dans cette action, puis la défaillance et un retour au refus du changement.
Et ainsi de manière cyclique pour tout processus de changement personnel, qu'il s'agisse de sa façon d'agir ou de se considérer soi-même. Par la suite, ces cycles ont été repris, de façon plus simple, pour décrire l'évolution des personnes qui tentent de se débarrasser d'une addiction, ou de changer quoi que ce soit dans leurs existences.
Ce cycle "motivationnel" serait commun à tous les êtres humains, et tout changement personnel, toute thérapie obéirait à cette trajectoire cyclique.
En gros, si nous avons l'impression de tourner en rond, c'est normal.
Si j'ai voulu partager avec vous cette théorie, c'est tout simplement pour que nous cessions de nous sentir, de nous croire "faibles", inférieurs, sous-hommes, parce que sur le chemin de la guérison, ou dans notre désir de changer certaines choses dans nos existences, les choses ne se font pas de façon linéaire, avec une progression constante etc.
La nature cyclique de notre appréhension du monde et de notre motivation nous empêche de considérer les choses avec du recul.
Ca me fait penser à autre chose d'ailleurs. Si le diagnostic de "cyclothymique" rassure certains parce qu'il met un nom sur quelque chose qui échappe au contrôle, chez d'autres, ce diagnostic est vécu comme une condamnation.
Pour autant, si nos "états d'être" sont par nature cycliques, à partir de quand peut-on parler de pathologie? Si, par nature, notre humeur est cyclique, qui est malade? A partir de quand peut-on parler de dysfonctionnement chez une personne?
Si vous avez des pistes, je suis preneuse...
Il faut arrêter de se flageller quand nous perdons notre motivation !
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- Mélina
- Messages : 443
- Enregistré le : mardi 01 février 2011 21:08
- decibella
- Membre d'honneur
- Messages : 1230
- Enregistré le : mardi 19 mai 2009 20:34
Il faut arrêter de se flageller quand nous perdons notre motivation !
Je suis pas trop convaincue par cette théorie . Je ne perçois pas la vie comme linéaire non plus. Je ne crois pas que les processus de nos pensées soient logiques, qu'ils aient un ordre. Que les choses reviennent ok (up and down) mais jamais de la même manière et souvent sans qu'on comprenne ce qui déclenche notre joie/désespoir.
Enfin, c'est juste mon avis entièrement subjectif
Après si j'ai bien compris ta question sur la normalité, je dirais que la pathologie commence là où la personne ressent un handicap. Quant au handicap, je pense que c'est une incapacité à satisfaire ses besoins, les besoins des autres et de la société (malgré tout).
C'est intéressant de réfléchir là-dessus en tout cas, donc merci Mélina
Enfin, c'est juste mon avis entièrement subjectif
Après si j'ai bien compris ta question sur la normalité, je dirais que la pathologie commence là où la personne ressent un handicap. Quant au handicap, je pense que c'est une incapacité à satisfaire ses besoins, les besoins des autres et de la société (malgré tout).
C'est intéressant de réfléchir là-dessus en tout cas, donc merci Mélina
- Mélina
- Messages : 443
- Enregistré le : mardi 01 février 2011 21:08
Il faut arrêter de se flageller quand nous perdons notre motivation !
Bonsoir Décibella,
J'ai trouvé ta réaction pleine de bon sens. Effectivement, les schémas sont forcément "schématiques" (bonjour la lapalissade...). Et la psychologie "positiviste", à l'anglo-saxonne, a sans aucun doute tendance à aimer les schémas et la statistique, qui déforment et mathématisent un peu trop les vécus personnels.
C'est surtout la notion de cycle quant à la motivation et au cheminement thérapeutique qui m'a intéressé, bien plus que ses étapes supposées. Ce côté cyclique, nous le vivons tous, et ce qui m'a intéressé c'est que cette théorie dégage cet aspect. Je me suis dit que ça pouvait être un outil possible pour que chacun de nous prenne du recul dans ses moments de faiblesse.
Les choses reviennent, dis-tu, c'est à ce qu'il m'a semblé intéressant de mettre en avant.
Quant à la limite entre pathologie et normalité pour ce qui concerne la cyclothymie.
Effectivement, je crois tout comme toi que le marqueur, c'est le ressenti personnel. Tu parles de "ressentir le handicap", je parlerais davantage de ressentir une souffrance. Le handicap est a priori une donnée objective, il correspond à une "incapacité à". Ce qui est handicap dans une société donnée ne l'est pas forcément dans une autre, et tu parles très justement selon moi du handicap comme d'une incapacité à satisfaire également aux critères, besoins d'une société donnée.
La pathologie psychologique correspondrait alors à une "incapacité à" ou à une "tendance à" et qui ferait souffrir, parce qu'elle serait inadéquate avec la société donnée.
Dans la Grèce antique, la pédérastie était connotée de façon très positive, c'était l'amour vrai, réservée à une certaine élite. Aujourd'hui, des hommes sont en prison à cause de leur homosexualité. Signe d'élévation d'âme un jour, maladie un autre.
Le rapport à la société et à ses exigences de cette société n'est pas la seule dimension de la pathologie psychologique. Pour ma part, je considère ses racines comme bien plus liées à des questions d'affects et d'émotions qu'à des questions d'adaptations sociales ou culturelles. Comme tu l'écris, le handicap c'est d'abord l'incapacité à satisfaire ses propres besoins.
Il reste que je me demande toujours dans quelle mesure les critères, parfois aveugles voire injustes, de nos univers socio-culturels ne nous handicapent pas davantage en nous conduisant à percevoir comme handicap ce qui n'est finalement peut-être qu'un trait de caractère qu'il nous incombe d'accepter. La maladie psychologique se définirait dans une certaine mesure d'abord en tant que souffrance, avant d'être une maladie "en soi". Même si je n'ignore pas que certaines maladies psychologiques conduisent à une destruction objective de l'être humain, je suis toujours en train de me demander dans quelle mesure le cerveau dit "malade" n'est finalement pas un cerveau qui fonctionne juste différemment.
Mais il est vrai qu'il reste toujours difficile de distinguer ce qui relève de la contrainte réelle objective imposée par l'environnement et ce qui relève de la contrainte que nous faisons peser sur nous-mêmes par nos propres projections...
Ou tout simplement peut-être définissons-nous de façon un peu trop rigide (psychorigide) nos désirs, nos besoins en fonction de mythes qui, s'ils sont nécessaires pour créer de la cohésion dans toute société et donner un support, un canal à nos émotions, n'en sont pas moins irréalistes, fallacieux, voire destructeurs à l'aune de l'individu. Des besoins qui seraient un horizon inatteignable et que nous croyons devoir réaliser à la lettre pour être heureux.
Euh... je m'égare peut-être un peu là. Sais pas si je suis très claire...
Enfin, en tout cas je te remercie d'avoir apporté de l'eau à mon moulin. Je t'embrasse.
J'ai trouvé ta réaction pleine de bon sens. Effectivement, les schémas sont forcément "schématiques" (bonjour la lapalissade...). Et la psychologie "positiviste", à l'anglo-saxonne, a sans aucun doute tendance à aimer les schémas et la statistique, qui déforment et mathématisent un peu trop les vécus personnels.
C'est surtout la notion de cycle quant à la motivation et au cheminement thérapeutique qui m'a intéressé, bien plus que ses étapes supposées. Ce côté cyclique, nous le vivons tous, et ce qui m'a intéressé c'est que cette théorie dégage cet aspect. Je me suis dit que ça pouvait être un outil possible pour que chacun de nous prenne du recul dans ses moments de faiblesse.
Les choses reviennent, dis-tu, c'est à ce qu'il m'a semblé intéressant de mettre en avant.
Quant à la limite entre pathologie et normalité pour ce qui concerne la cyclothymie.
Effectivement, je crois tout comme toi que le marqueur, c'est le ressenti personnel. Tu parles de "ressentir le handicap", je parlerais davantage de ressentir une souffrance. Le handicap est a priori une donnée objective, il correspond à une "incapacité à". Ce qui est handicap dans une société donnée ne l'est pas forcément dans une autre, et tu parles très justement selon moi du handicap comme d'une incapacité à satisfaire également aux critères, besoins d'une société donnée.
La pathologie psychologique correspondrait alors à une "incapacité à" ou à une "tendance à" et qui ferait souffrir, parce qu'elle serait inadéquate avec la société donnée.
Dans la Grèce antique, la pédérastie était connotée de façon très positive, c'était l'amour vrai, réservée à une certaine élite. Aujourd'hui, des hommes sont en prison à cause de leur homosexualité. Signe d'élévation d'âme un jour, maladie un autre.
Le rapport à la société et à ses exigences de cette société n'est pas la seule dimension de la pathologie psychologique. Pour ma part, je considère ses racines comme bien plus liées à des questions d'affects et d'émotions qu'à des questions d'adaptations sociales ou culturelles. Comme tu l'écris, le handicap c'est d'abord l'incapacité à satisfaire ses propres besoins.
Il reste que je me demande toujours dans quelle mesure les critères, parfois aveugles voire injustes, de nos univers socio-culturels ne nous handicapent pas davantage en nous conduisant à percevoir comme handicap ce qui n'est finalement peut-être qu'un trait de caractère qu'il nous incombe d'accepter. La maladie psychologique se définirait dans une certaine mesure d'abord en tant que souffrance, avant d'être une maladie "en soi". Même si je n'ignore pas que certaines maladies psychologiques conduisent à une destruction objective de l'être humain, je suis toujours en train de me demander dans quelle mesure le cerveau dit "malade" n'est finalement pas un cerveau qui fonctionne juste différemment.
Mais il est vrai qu'il reste toujours difficile de distinguer ce qui relève de la contrainte réelle objective imposée par l'environnement et ce qui relève de la contrainte que nous faisons peser sur nous-mêmes par nos propres projections...
Ou tout simplement peut-être définissons-nous de façon un peu trop rigide (psychorigide) nos désirs, nos besoins en fonction de mythes qui, s'ils sont nécessaires pour créer de la cohésion dans toute société et donner un support, un canal à nos émotions, n'en sont pas moins irréalistes, fallacieux, voire destructeurs à l'aune de l'individu. Des besoins qui seraient un horizon inatteignable et que nous croyons devoir réaliser à la lettre pour être heureux.
Euh... je m'égare peut-être un peu là. Sais pas si je suis très claire...
Enfin, en tout cas je te remercie d'avoir apporté de l'eau à mon moulin. Je t'embrasse.
- decibella
- Membre d'honneur
- Messages : 1230
- Enregistré le : mardi 19 mai 2009 20:34
Il faut arrêter de se flageller quand nous perdons notre motivation !
Je te trouve claire tkt, je suis tout à fait d'accord sur le fait que c'est plutôt la souffrance qui caractérise la cyclothymie.
C'est vrai que c'est fou l'évolution des us et coutumes... Et toujours le manichéisme dans tout cela. Enfin, on va pas refaire les Hommes hein !
Motivation, il paraît que ce mot n'était pas autant à la mode il fut un temps, je sais pas si c'est vrai
Je t'embrasse également, je peux pas écrire plus car toutes les pensées entamées sont déclarées pourries par mon esprit
C'est vrai que c'est fou l'évolution des us et coutumes... Et toujours le manichéisme dans tout cela. Enfin, on va pas refaire les Hommes hein !
Motivation, il paraît que ce mot n'était pas autant à la mode il fut un temps, je sais pas si c'est vrai
Je t'embrasse également, je peux pas écrire plus car toutes les pensées entamées sont déclarées pourries par mon esprit
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